International

Repenser l’habitabilité planétaire depuis les villes africaines

Géographe et urbaniste, Architecte

L’Afrique est devenue le nouvel empire du béton, matériau très facile à produire et perçu comme moderne et résistant. Mais le béton pollue et s’écroule plus vite qu’on ne l’imagine. Des architectes comme Francis Kéré et des écoles alternatives imaginent un urbanisme différent, à Lomé, à Dakar et au Sahel, reposant sur des savoirs vernaculaires. L’avenir de l’habitat pourrait bien se dessiner en Afrique, où la dystopie bétonnée laisse place à l’Afrofuturisme.

En mars 2022, l’architecte burkinabé Francis Kéré se voit décerner le prix Pritzker, l’équivalent du prix Nobel pour l’architecture. Cette distinction marque la reconnaissance de l’architecture africaine, longtemps ignorée et dénigrée. Mais, alors que Kéré prône le retour aux matériaux locaux et la redécouverte des savoir-faire vernaculaires, force est de constater que le béton domine très largement les paysages urbains africains.

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Symbole de modernité et de succès, ce matériau est devenu omniprésent. Il est pourtant aujourd’hui largement contesté pour son empreinte carbone. Alors que l’Afrique est particulièrement touchée par les effets du changement climatique et qu’elle abritera un quart de la population mondiale en 2050, nous interrogeons les modes d’habiter contemporains et invitons à penser nos futurs urbains depuis ce continent.

Du Béton Made in Africa

« Je rêve d’être footballeur, comme Samuel Eto’o ou… cimentier, comme Aliko Dangote » explique Olumide, du haut de ses 11 ans, lorsque nous le rencontrons à Lagos. Olumide, comme tous les enfants ouest-africains, connaît Dangote, l’homme le plus riche du Nigeria et d’Afrique (et 130e fortune du monde selon le magazine Forbes). Aliko Dangote, magnat du ciment, incarne la nouvelle figure de la réussite en Afrique. Depuis les années 2000, la compagnie Dangote a ouvert des cimenteries sur tout le continent à partir de carrières de calcaire locales pour produire la précieuse poudre grise qui, mélangée à du sable, du gravier et de l’eau, donne du béton. Le ciment, qui était hier un matériau d’importation réservé aux quartiers coloniaux et aux élites, est désormais produit localement et perçu comme 100 % Made in Africa.

En ouvrant ses cimenteries et en concurrençant les grands groupes européens comme Holcim (Lafarge) et Heiddelberg, Dangote a « africanisé » le ciment et permis de faire baisser son prix de vente. Celui-ci est aujourd’hui considéré comme un bien de première nécessité, souvent subventionné par l


Armelle Choplin

Géographe et urbaniste, Professeure à l'Université de Genève

Sénamé Koffi Agbodjinou

Architecte, Créateur de L'Africaine d'architecture