Analyse
Opinion
Critique
Aujourd’hui
27.01.21
Opinion
La mise à distance du Proche-Orient
par Leyla Dakhli
Il y a dix ans, le Printemps arabe enflammait le Proche-Orient sous le regard attentif, et souvent surplombant, de l'Occident. L'épisode interroge le sens de cette proximité proclamée par un terme géographique, mais qui dit aussi une vision politique, culturelle, religieuse héritée de l'époque coloniale. En mettant de côté le mot « Orient » mais aussi l’adjectif qui le qualifie, il est possible de s’approcher, de varier les distances pour porter le regard sur les sociétés des mondes arabes, et peut-être de forger une proximité « sans arrière-pensée ». Un article publié à l’occasion de la Nuit des idées 2021 dont le thème est « Proches ».Critique
« On était souvent gentils, je crois » – sur Hervelino de Mathieu Lindon
par Virginie Bloch-Lainé
Récit autobiographique des deux années qu’ils ont passées à Rome, à la Villa Médicis, entre 1987 et 1989, Hervelino raconte l’amitié qui liait Mathieu Lindon à l’écrivain et photographe Hervé Guibert, qui mourra 15 mois après leur retour. Le livre déborde de pensées sur l’écriture, la méchanceté, le courage, l’amitié, la jalousie, la mort, l’argent, le confort matériel, la capacité ou l’incapacité à être heureux et à se réjouir. Si la plaisanterie et le pas de côté le dominent, Hervelino est autant mélancolique que formidablement vivant.
mardi
26.01.21
Analyse
Crise sanitaire : entre confiance et méfiance, une mince frontière
par Pierre-Michel Menger
Alors que l'hypothèse d'un troisième confinement se précise, l'expertise scientifique ne suffit plus pour générer la confiance nécessaire à l'acceptation de ce genre de mesure. Peu à peu, tous les producteurs de diagnostics sur les effets économiques, sociaux, psychologiques et générationnels de la pandémie, ou encore sur les causes de celle-ci, se sont en effet invités dans le cercle des experts. L'analyse sociologique de la crise sanitaire permet ici d'en révéler les mécanismes, et les paradoxes, de montrer qu'entre confiance et méfiance, la frontière est mince.Opinion
Colonial, décolonial, postcolonial, psychanalyse
par Benjamin Lévy
À côté d'une psychiatrie qui a pu donner bonne conscience aux colonisateurs, les liens entre psychanalyse et décolonisation s'avèrent plus complexes. En effet, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, des postures postcoloniales firent leur apparition. Certaines d'entre elles mobilisèrent alors le discours et les notions analytiques afin d’alimenter des modes de conceptualisation critiques que nul, aujourd'hui, ne peut tout à fait ignorer. Toutefois, cela n'est pas sans avoir donné lieu à de vives controverses. Forte de cet héritage contrasté, la psychanalyse (ou les psychanalystes ?) reste attendue au tournant.Critique
Quand l’immortalité tient à quelques tessons – sur La Nuit des orateurs d’Hédi Kaddour
par Cécile Dutheil de la Rochère
Quittant le grand parc du roman contemporain du « réel », le nouveau livre d’Hédi Kaddour se déroule sous la Rome antique, manière de s’interroger sur les vestiges de cet héritage lointain. Il y a de l’archéologie dans cette démarche. On retrouve ainsi un goût pour l’érudition et pour les sonorités latines, non sans humour parfois. Mais, surtout, il appartient à l’écrivain d’exercer son imagination pour combler les zones grises et les blancs historiques.
lundi
25.01.21
Analyse
Le Monde chez soi ou comment les objets nous rapprochent
par Pierre Singaravélou et Sylvain Venayre
L'épidémie de Covid, qui oblige à la distanciation sociale, a paradoxalement montré à quel point les quatre coins du Monde étaient proches, plus encore qu'on ne pouvait se le figurer. Ce sont sans doute les objets, comme les masques de protection, qui ont révélé la réalité d'une mondialisation multipolaire, dont le moteur et les principaux acteurs se trouvent souvent hors d’Europe. Une situation moins récente, et bien plus complexe que nous le croyons généralement, comme le montre l'histoire matérielle, par les objets. Un article publié à l’occasion de la Nuit des idées 2021 dont le thème est « Proches ».Opinion
Dix ans après, l’écume des journées révolutionnaires en Égypte
par Youssef El Chazli
Jour férié en Égypte, le 25 janvier célèbre l’anniversaire de la révolution de 2011, un événement inédit et littéralement extra-ordinaire. Pour comprendre cette vague, cette déferlante, on se doit d’observer non seulement les courants, les grandes forces souterraines à l’œuvre, mais aussi l’éphémère écume : la présence et la prise de parole de tous ces révolutionnaires ordinaires, qui bien vite disparurent sous la répression. Qu’a représenté cet événement pour ses centaines de milliers de participant·e·s ?Critique
La maison hantée du corps des femmes – à propos de Sœurs de Daisy Johnson
par Emmanuelle Lambert
C'est dans l'exploration du lien des deux adolescentes que Sœurs donne toute sa mesure. Daisy Johnson développe un art de l'inquiétude, une esthétique du doute qui peuvent évoquer, par endroits, aussi bien Laura Kasischke que Stephen King, Daphné du Maurier que Marguerite Duras. Et dans ces scènes d'exclusivité sororale, douloureuse et jouissive, ce thriller s'ouvre à la poésie la plus noire, où l'amour se fond avec la possession, et l'autre est perçu comme en morceaux, à travers la peau, les cheveux, les dents, l'odeur de l'haleine, la façon de se tenir au bout d'un couloir.
dimanche
24.01.21
Fiction
L’homme nu et autres poèmes
par Alberto Moravia
C'est avec un choix de poèmes inédits d'Alberto Moravia que nous concluons notre série de bonnes feuilles de cette rentrée littéraire étrangère. Moravia romancier, nouvelliste, essayiste, critique, éditeur, est mondialement connu. Son œuvre de poète, posthume, l'est moins. Elle est recueillie pour la première fois en volume en France. « Aphorismes intimes », c'est ainsi que leur traducteur et préfacier René de Ceccaty désigne ces textes autobiographiques, mélancoliques, libres. Un poème consacré à l'assassinat de Pasolini, le grand ami, ne sera pas la moindre des découvertes. Édition bilingue établie, présentée et annotée par Alessandra Grandelis, à paraître chez Flammarion.
samedi
23.01.21
Entretien
Timothy J. LeCain : « Le culturel est toujours matériel, et le matériel est toujours culturel. »
par Claudio de Majo
L’homme moderne pensait pouvoir contrôler la nature, à tort. S'il en était encore besoin, l’actuelle pandémie de coronavirus suffit spectaculairement à l'illustrer. En fait, le rapport entre nature et culture doit plutôt être compris comme une interaction, comme un jeu d’influence réciproque au sein d’un processus coévolutif. C’est ce que défend l’historien de l’environnement Timothy J. LeCain sous le nom de « néo-matérialisme », matérialisme qui intègre les récentes avancées en sciences humaines et en sciences de la nature.
vendredi
22.01.21
Analyse
Trois scènes du Capitole : la guerre des images a bien eu lieu
par Dork Zabunyan
En l'espace de deux semaines, le Capitole a été le lieu de trois scènes qui se répondent, et resteront longtemps dans les mémoires : la cérémonie d'investiture de Joe Biden et Kamala Harris le 20 janvier, précédée des images de Washington transformé en zone de guerre, et avant cela bien entendu des images de la tentative d'insurrection menée par les partisans de Donald Trump le 6 janvier. Trois batailles pour une séquence qui montre que les images sont au cœur de la guerre pour la survie des institutions démocratiques, comme de notre capacité à les renouveler.Opinion
Trump ou le refus masculiniste du deuil
par Judith Butler
Trump a quitté la Maison Blanche. Il n'est plus le Président des États-Unis mais il n'a toujours pas fait le deuil de cette élection perdue. Ses derniers jours au pouvoir, l'assaut du Capitole comme la non-reconnaissance des victimes du Covid-19 ou les dernières exécutions capitales qu'il a ordonnées témoignent du déni de celui qui préfère détruire la réalité, halluciner une réalité préférée, plutôt que d'enregistrer le verdict de perte délivré par la réalité.Critique
La Force et la Tendresse – à propos de The Mandalorian
par Lucile Commeaux
Aux antipodes d'un Tenet, parangon de ce que le concept même d’auteur fait au blockbuster – une créature fière et arrogante, qu’on a envie d’analyser à l’infini mais qu’on n’a pas envie d’aimer – la série picaresque The Mandalorian induit une réception rigoureusement inverse : elle repose nos yeux fatigués par le visionnage compulsif de fictions à tiroirs.
jeudi
21.01.21