L’incessante politisation de l’immigration
Demandée par les organisations professionnelles des secteurs économiques concernés, appelée de leurs vœux par les organisations syndicales de défense des employés, l’introduction d’une carte de séjour temporaire « métiers en tension » annoncée dans le nouveau projet de loi immigration a beau correspondre aux intérêts économiques du pays, elle risque de n’être perçue que comme un signal pour faire plaisir à la gauche. Il en va ainsi de la plupart des décisions prises en matière d’immigration et d’intégration depuis ces quarante dernières années, en France comme dans d’autres pays d’immigration : engager un rapport de force politique, davantage que de résoudre les problèmes qui se posent.

En effet, l’arrivée du « Projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » au Sénat puis à l’Assemblée nationale, au printemps 2023 ne répond pas à une séquence de mise à l’agenda, où l’identification du problème proviendrait de l’analyse des conditions de vie des immigrés et des besoins en matière économique, mais bien à une nouvelle étape du combat politique.
Après les élections de mai 2022 où le sujet de l’immigration a été évoqué jusqu’au deuxième tour de l’élection présidentielle, il s’agit pour le gouvernement de se positionner politiquement sur un axe gauche-droite qui recouperait les pour et les contre l’immigration. Or, c’est bien le paradoxe de cette loi que de ne satisfaire ni les pour, ni les contre, tant elle apparaît fondée sur des perceptions faussées des problèmes qui se posent.
Le titre du projet de loi s’inscrit dans une longue tradition de prise en compte des questions d’immigration en France : contrôler l’immigration, améliorer l’intégration. La première tentative d’institutionnalisation d’une catégorie d’intervention publique avec la création d’un secrétariat d’État aux travailleurs immigrés en 1974 comportait déjà cette articulation entre régulation des flux et gestion de l’intégration[1]. Cependant, si le deuxième volet se rapporta