Berlusconi en moi
Pasolini disait que le montage cinématographique est une bonne métaphore de la vie humaine : de même que le film acquiert son sens seulement après qu’il a été mis en forme par le montage, c’est seulement après la mort que l’on peut évaluer la signification d’une vie. Je partirai donc des funérailles de Berlusconi et de l’illusion d’optique qu’elles ont produit.

C’est toute l’Italie émue qui les a suivies ou bien au contraire la moitié de l’Italie y était-elle opposée ? En réalité, 10 % environ des Italiens étaient vraiment en deuil, de nombreux autres étaient circonspects ou bien ont vécu le moment comme une libération. « On l’enterre ; c’est bon, passons à autre chose. » Et pourtant il est vrai que la plupart des Italiens, moi y compris, a constaté au long des années que le berlusconisme était entré en eux : anthropologiquement, culturellement. « Je ne crains pas Berlusconi en soi, mais Berlusconi en moi » est un aphorisme attribué au musicien et homme de théâtre Giorgio Gaber (en fait il est de son collaborateur, le chanteur Gian Piero Alloisio).
Les funérailles nationales étaient dues au fait que Berlusconi a été quatre fois président du Conseil et sénateur, mais elles n’ont pas eu lieu dans la capitale : le président de la République a dû se déplacer et aller à Milan, le lieu cardinal du Berlusconi promoteur, patron de football et producteur audiovisuel. Ainsi donc les drapeaux des édifices publics étaient-ils mis en berne pour le président du Milan AC (comme les cris sur la place ont semblé le démontrer) et le patron de Mediaset, pour l’ami de Gerry Scotti et de Barbara d’Urso[1] ?
On a souligné la rigueur morale typiquement « milanaise » de la famille, des fils et de la dernière compagne ; tandis qu’une des épouses s’est tenue dans les premiers rangs du Duomo pour suivre la cérémonie, qu’une autre a écrit un message affectueux et que l’avant-dernière compagne (aujourd’hui unie civilement à une célèbre chanteuse) se tenait sur l’un des bancs plus en a