Le 7 octobre et les intellectuels du Moyen-Orient
Pour Elad et Zahiye
Parmi les spectateurs silencieux du drame qui se déroule sous nos yeux depuis les monstruosités commises le 7 octobre, il existe un groupe dont le silence devrait nous interpeller : celui des intellectuels du Moyen Orient qu’on pourrait qualifier de progressistes, faute de mieux

On ne les entend guère ni au Moyen Orient ni ici en Occident. Puisque je m’identifie à ce groupe, depuis maintenant deux mois je ne cesse de m’interroger sur ce silence qui est aussi le mien : qu’est-ce qu’il nous arrive pour nous laisser à ce point sans voix cette fois, nous réduire au silence ou nous rendre inaudibles même lorsque nous nous efforçons d’élever la voix ? Dans tous ces cas de figures, je ne vois qu’une seule raison : la solitude abyssale où nous nous retrouvons désormais, nous ce groupe de plus en plus minoritaire, une espèce décidément en voie d’extinction.
Malgré la différence de nos orientations ou de nos choix politiques, notre principal point commun fut de nous donner la vocation de vivre, voir, penser et parler entre l’Occident et le Moyen-Orient, de s’inspirer de la modernité de l’un pour moderniser l’autre, d’entraîner les deux dans un dialogue critique et de les faire ainsi avancer ensemble. Jamais cette position médiane ne s’était avérée à ce point difficile à tenir. Depuis le 7 octobre, elle est devenue un tiraillement insoutenable entre deux camps, deux raisons, deux vérités, deux “lives” de chaînes d’info, deux faits, deux mondes. Au beau milieu de l’ère de l’information, les réalités d’un monde n’évoquent, dans l’autre, que quelques sentiments dubitatifs au mieux, souvent la négligence ou le dédain ; elles deviennent les images montées à l’usage des dupes ou de pures fake news. Comment en est-on arrivé là, à minimiser, nier, voire célébrer, d’un côté, l’odieux massacre des civils israéliens et, de l’autre, celui des masses palestiniennes ? Selon la seule loi communément en vigueur, chacun est dorénavant censé parler aux siens, les