Mayotte ou les symptômes d’une société fragmentée et désorganisée
«Imaginez-vous un département français sans eau courante depuis quatre mois, où des militaires distribuent chaque jour des packs d’eau, où la moindre intervention du SAMU est désormais escortée la nuit par des forces de l’ordre, où il est interdit d’organiser des compétitions de football parce que des jeunes s’entretuent en marge des matchs, où les policiers, eux-mêmes, dénoncent « la politique du chiffre » qui ne mène nulle part, où des élus défilent pour réclamer « l’état d’urgence », où un maire organise dans sa ville une prière pour la paix parce qu’il n’y a plus que la religion pour tenter d’apaiser, et où il faudrait chaque année construire des dizaines d’écoles tellement la démographie est folle. Bienvenue à Mayotte, le 2 janvier 2024 ! »

Les mots choisis par le journaliste de France Inter, Maxence Lambrecq, pour introduire son édito politique du 2 janvier 2024 résument assez bien le sentiment communément partagé d’une crise permanente dans le 101e département français. « Crise sociale », « crise migratoire », « crise sécuritaire », « crise de l’eau » ou encore « crise sanitaire » : l’île de Mayotte aurait de quoi occuper à elle seule l’agenda du ministre de l’intérieur et des Outre-mer ! Gérald Darmanin avait d’ailleurs prévu de s’y rendre ce week-end mais une autre crise, celle des agriculteurs, l’a retenu à Paris.
Sa visite à Mayotte était pourtant très attendue. Des « collectifs de citoyens » tiennent des barrages depuis environ trois semaines pour réclamer le démantèlement d’un camp de réfugiés africains, érigé sur le terrain de football de Cavani à Mamoudzou. Quelques semaines plus tôt, l’île observait une série d’émeutes et de violences juvéniles particulièrement marquante. En marge d’un colloque sur les Outre-mer qui s’est tenu à Paris le 1er février, le ministre a tenu à rassurer les élus mahorais : «L’autorité de l’État va se mesurer non pas simplement en nombre de policiers et gendarmes supplémentaires, mais au changement de droit, sans d