Logement, espace public et dictature au Venezuela
Caracas, dimanche 28 juillet 2024 à minuit, un concert de casseroles résonne dans toute la capitale vénézuélienne après l’annonce solennelle du CNE (Conseil National Electoral) proclamant Nicolas Maduro, à la tête du pays depuis 2013, vainqueur des élections (52 %) devant Edmundo Gonzalez Urrutia[1], le principal candidat du parti d’opposition, le Mesa Unidad Democratica (MUD).

« Le résultat est irréversible », proclame Elvis Amoroso, Président du CNE, tout en expliquant qu’une « cyberattaque au serveur » avait retardé la vérification, et de fait, l’annonce des résultats. Aucune justification, aucune pièce officielle n’est diffusée : ces quelques mots seuls officialisent un nouveau mandat de six ans à l’actuel président.
Tandis qu’un somptueux feu d’artifice est tiré du centre-ville de Caracas, le son des gamelles de cuisine martelées en guise de protestation continue de se répandre des tours aux favelas, des quartiers populaires aux plus huppés de la ville, marquant ainsi une fracture du pays, une désolidarisation des habitants au pouvoir en place. Dans certains quartiers, la population avait commencé à se mobiliser la veille, passant la nuit devant les bureaux de vote afin de s’assurer de pouvoir déposer à l’ouverture son bulletin, projetant, à tort ou à raison, une fermeture anticipée des tables (bureaux de vote), ou la violence des guérillas civiles armées par l’État pour « maintenir l’ordre » dans les quartiers paupérisés de la ville.
Si le pays avait déjà connu deux élections supposées tronquées, les présidentielles de 2013 et de 2018, rien ne permettait de penser que la suspicion de triche déjà dénoncée à l’époque par le parti d’opposition (MUD) se confirmerait encore une fois. Lors de ces dernières élections de 2024, le scénario semblait différent. Les estimations qui circulaient officieusement sur les réseaux sociaux donnaient l’opposition largement vainqueur. Le MUD était parvenu à faire naître l’espoir de changement avec une mobilisation citoyen