Arrestation de Gao Zhen : liberté confisquée… régime fragilisé ?
Il y a maintenant plus d’un mois que Gao Zhen a été arrêté par le bureau de la sécurité publique chinoise. Avec son frère Gao Qiang, il compose depuis plus de trente ans le collectif des Gao Brothers, figures majeures de l’art contemporain en Chine.
Le 26 août dernier, une trentaine de policiers ont débarqué dans le studio des artistes à Yanjiao dans la banlieue de Pékin pour y mener une perquisition et saisir des documents, des ordinateurs, des disques durs et des œuvres. L’ampleur de l’intervention pourrait faire croire qu’ils ont mis hors d’état de nuire un dangereux criminel. Et pourtant, la cible de cette opération était un artiste et poète, paisible et chaleureux, allant vers ses 70 printemps, et qui s’apprêtait à s’installer définitivement aux États-Unis.
De quelle menace Gao Zhen est-il le nom pour les autorités chinoises ? De quoi la deuxième puissance militaire de la planète a-t-elle peur pour procéder à l’arrestation d’un homme inoffensif ?
Les martyrs, les héros et les fantômes du passé
Gao Zhen est soupçonné de « délit d’atteinte à la réputation et à l’honneur des martyrs et héros », une inculpation que la justice chinoise justifie par des œuvres relativement anciennes (1990-2000) qui proposaient une représentation critique des figures, des lieux, des dispositifs et des symboles du pouvoir, en particulier de la figure sacralisée du « Président Mao ».
Trois créations des artistes semblent avoir retenu l’attention de la sécurité publique. La première, intitulée « La repentance de Mao à genou » (2009), est un bronze à taille humaine de l’ancien dirigeant chinois qui, par sa posture, reconnaît sa culpabilité. La seconde, « L’exécution du Christ » (2009), bronze monumental, se compose de huit clones de Mao mettant en joue une représentation du Christ – création palimpseste qui s’inspire explicitement de « L’exécution de l’Empereur Maximilien » de Manet. La troisième est une série de bronzes colorés nommés « Miss Mao » (2006), et représente des bustes grotesques composés d’un visage de Mao féminisé affublé d’un nez à la Pinocchio et de seins protubérants.
Dans son argumentaire accusatoire, la justice chinoise ne retiendra sans doute que ces œuvres anti-autoritaires au sein d’une production artistique dense et foisonnante, autant sur le plan formel que thématique. Les créations les plus récentes des Gao Brothers ne portent pas spécifiquement sur la Chine, son histoire ou ses dirigeants. Gao Qiang soulignait même récemment qu’ils s’étaient lassés de travailler sur « les fantômes de la Révolution culturelle ». Les œuvres saisies par la justice chinoise sont d’ailleurs toutes antérieures à la loi qui légitime juridiquement l’inculpation de Gao Zhen.
Promulguée en 2018, la législation sur la « protection des héros et des martyrs » est entrée dans le code pénal en 2021 : « Il est interdit de dénaturer, diffamer, blasphémer ou nier les exploits et l’esprit des héros et des martyrs » (article 22). Plusieurs condamnations à des peines de prison ont déjà été prononcées dans le cadre de cette loi.
Au-delà même des enjeux cruciaux liés à la liberté de création et aux droits fondamentaux que soulève ce type de juridiction, son application rétroactive est contraire aux normes minimales de l’État de droit. Inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 (article 11), le principe de non-rétroactivité des lois est aussi gravé dans le marbre de la « Loi sur la législation » (article 84, 2000) de la République Populaire de Chine.
Depuis l’ère Deng Xiaoping, le régime a entrepris une réforme profonde de son droit avec pour objectif d’offrir un cadre juridique stable, moins arbitraire et plus propice à l’épanouissement de l’économie de marché et à l’intégration de la Chine dans la mondialisation. Mais l’ambition de « gouverner par la loi » au sein d’un « État de droit socialiste » ne résiste pas à un État-parti qui, dans son fonctionnement et dans son esprit, ne pratique pas la séparation des pouvoirs. Loin d’être un garde-fou qui protège les citoyens des excès du pouvoir, le système judiciaire chinois reste un outil de légitimation au service du régime, de sa stabilité, et même de sa survie[1].
Les termes de la loi qui a permis l’inculpation de Gao Zhen ont une dimension éminemment politique. Quelles sont les instances, sinon celles de l’État-parti, qui fixent les critères d’appartenance au groupe des « héros et des martyrs » de la patrie ? Si ces catégories s’inscrivent dans la longue durée de l’histoire impériale, elles appartiennent au langage du pouvoir depuis la fondation du régime en 1949[2]. La sacralisation, et la sanctuarisation, de figures historiques, de symboles ou d’institutions est un geste politique qui précède la qualification juridique. Les « héros et les martyrs » de la loi sont uniquement ceux d’une histoire officielle dont le régime contrôle étroitement la narration.
Xi Jinping, le nihilisme historique et l’héritage de Mao
L’arrestation de Gao Zhen est la dernière manifestation du puissant virage autoritaire entamé par Xi Jinping depuis sa prise de fonction en 2013. Sous ses mandats successifs, il a sévèrement durci la politique coloniale – et génocidaire par certains de ses aspects – dans la région ouïghoure, modifié la Constitution de manière à renforcer son pouvoir personnel sur le Parti ainsi que celui du Parti sur les institutions de l’État, et exploité opportunément la crise du covid-19 pour mater les velléités démocratiques de la société hongkongaise.
De manière moins spectaculaire et néanmoins décisive, Xi Jinping a œuvré méthodiquement pour une reprise en main du champ de l’idéologie et de l’imaginaire social. Les espaces de production des idées ont été mis au pas afin de limiter la diffusion de pensées, de discours et de représentations du monde et de la société considérées comme alternatives à celles du pouvoir en place. La censure s’accompagne d’une injonction faite aux « travailleurs des arts et de lettres » de participer à ce travail idéologique, sous peine de subir des procès en patriotisme. Dans un discours sur le sujet en 2018, Xi Jinping précisait la feuille de route pour les artistes dont la mission était de « continuer [à] produire des chefs-d’œuvre qui glorifient le Parti, la mère patrie, le peuple et ses héros »[3].
Parmi les déviances de la pensée visées par le régime, celle du « nihilisme historique » apparait comme pertinente pour éclairer le contexte de l’arrestation de Gao Zhen. Cette expression désigne l’ensemble des récits alternatifs ou interprétations critiques du roman national narré par l’appareil idéologique d’État. Cette loi mémorielle sur les « martyrs et les héros » est un outil juridique puissant visant à éradiquer les lectures dissidentes de l’historiographie officielle susceptibles de fragiliser cette consolidation idéologique.
Elle a été précédée par plusieurs controverses dont celle visant l’historien Hong Zhenkuai qui avait eu l’audace de contester, sur la base d’une méthode historique rigoureuse, la véracité d’un épisode légendaire de la Guerre de résistance contre le Japon : « Les cinq héros du Mont Langya ». Alors qu’à l’époque aucune loi ne protégeait la mémoire des héros de la nation, la cour suprême avait pris faits et causes contre l’historien et son éditeur au motif qu’ils blessaient « les sentiments nationaux du public, [soulevaient] les critiques de la société, voir [provoquaient] des réactions émotionnelles »[4].
Il est ironique de constater que, dans son approche très sélective du passé, le régime oublie facilement les drames et les crimes commis en son nom (Cent Fleurs, Grand bond en avant, Révolution culturelle, Tian’anmen 89, etc.) mais conserve une mémoire pointilleuse lorsqu’il s’agit de ses ennemis et de leurs supposés méfaits.
L’actuel Secrétaire général du Parti est le garant de la perpétuation d’une tradition maoïste qui trouve son origine dans les « Causeries de Yan’an sur les arts et les lettres » en 1942[5]. À l’époque, face aux critiques d’intellectuels et d’écrivains qui défendaient leur liberté de création, Mao Zedong va imposer une ligne qui subordonne totalement les productions culturelles aux objectifs politiques et idéologiques du Parti en éliminant les « opinions dissidentes et non-orthodoxes »[6].
C’est cette ligne-là qui justifiera les violentes campagnes visant les écrivains, les artistes et les intellectuels qui auront eu l’audace de proposer – sous des formes diverses – un récit alternatif à l’État-parti sur le passé, le présent ou le futur de la Chine : Ding Ling, Ai Qing, Yu Luoke, Lin Zhao, Wei Jingsheng, Bei Dao, Fang Lizhi, Liu Xiaobo, Ai Weiwei, etc. Gao Zhen semble être la dernière victime de cette longue tradition répressive.
À l’évidence, les gardiens du passé auront eu peu de mal à trouver des preuves de ce qu’ils désignent sous le nom de « nihilisme historique » dans le studio des Gao Brothers. Et pourtant, le régime a reconnu, dès 1981, une culpabilité relative de Mao dans la fameuse « Résolution » sur l’histoire du Parti qui faisait un bilan critique des errements criminels de la Révolution culturelle : il avait commis des « erreurs » mais sa responsabilité était limitée et, surtout, la « pensée Mao Zedong » n’était pas en cause.
À travers cette synthèse fragile, Deng Xiaoping marquait sa distance avec les choix politiques désastreux de la période précédente tout en assumant une continuité institutionnelle et politique indispensable à la survie du régime. La répression brutale du soulèvement pro-démocratique de Tian’anmen en 1989 allait confirmer un exercice du pouvoir autoritaire hérité des premières décennies du régime sans toutefois sombrer dans les excès totalitaires du maoïsme.
Depuis son arrivée au pouvoir, Xi Jinping a confirmé cette doxa officielle – alors même que, ironiquement, lui et son père ont compté parmi les victimes des politiques maoïstes – mais en proposant une réhabilitation appuyée de la figure et de la pensée du fondateur de la République Populaire. À la différence de ses prédécesseurs, il assume plus nettement d’inscrire son règne dans une forme de continuité avec le Grand Timonier. Mao, dont le portrait est toujours suspendu au fronton de l’entrée de la Cité interdite, reste une figure métonymique pour le régime de Pékin, indissociable de son identité politique et symbolique. Il n’est donc pas surprenant que les représentations sarcastiques de ce personnage sacralisé puissent être considérées comme offensantes, voire blasphématoires, pour les gardiens de l’idéologie officielle.
Les artistes face à une mémoire traumatique et une histoire falsifiée
Le plus intriguant dans cette triste affaire reste le timing. Pourquoi s’en prendre aujourd’hui à des artistes qui commettent des œuvres problématiques pour le régime depuis plus de trente ans ?
Plasticiens, photographes, peintres, poètes et performeurs, Gao Zhen et Gao Qiang exploitent toutes les formes de l’art pour donner à penser les sociétés contemporaines[7]. Ils envisagent la création comme une interrogation illimitée portée sur les institutions, les valeurs, les pratiques et les représentations collectives de la société. Leurs interventions tentent d’éclairer le monde qui les entoure au moyen du langage formel et symbolique de l’art : « Ni la beauté, ni l’argent ne constituent la finalité de notre art, il vise à expliciter les événements et les conditions, il est au service de l’humanité » disaient-ils au curateur Arthur Hwang en 2010 .
Dans une Chine post-Tian’anmen façonnée par les réformes de Deng Xiaoping, ils ont été les témoins privilégiés d’une croissance forte mais très inégalement répartie, d’une urbanisation incontrôlée et de l’épanouissement d’un capitalisme de la consommation. Leurs œuvres ont constitué autant de réflexions critiques sur ces mutations de la société chinoise. Le triomphe de l’hégémonie marchande, la misère de la vie quotidienne dans des villes bétonnées et déshumanisées, l’atomisation des individus et le manque de fraternité sont ainsi quelques-uns des enjeux qui ont traversé leurs créations dans les années de l’entre-deux siècles.
Cette critique sociale, culturelle et esthétique de la modernité « à la chinoise » s’est toujours articulée avec une critique politique de la dimension autoritaire, spectaculaire et arbitraire de l’exercice du pouvoir en Chine Populaire. Comme ils l’affirment dans leur essai One Day in Beijing : « Tant que la valeur des humains, leur liberté et leur dignité ne seront pas respectées, il demeurera impossible d’habiter poétiquement le monde »[8].
Loin d’être un objectif en soi, le caractère subversif de leurs créations fut d’abord un effet des dispositifs de censure et de contrôle de l’expression publique par les pouvoirs institués chinois. Dès leurs premières créations, les Gao Brothers sont devenus familiers des œuvres confisquées, des expositions annulées, des assignations à résidence, de la présence de policiers en faction devant leur studio ou des menaces de « militants maoïstes » devant des œuvres jugées offensantes.
L’engagement des Gao Brothers est indissociable d’une histoire familiale marquée par les convulsions politiques de la Chine maoïste. Identifié comme un « ennemi de classe » et un « contre-révolutionnaire », le père des Gao Brothers fut sacrifié sur l’autel de la violence propre à la Révolution culturelle. Cette expérience, lot commun de millions de familles à l’époque, fut sans doute décisive dans les choix artistiques initiaux des deux frères. Elle élucide partiellement leur confrontation tenace avec le régime de Pékin et les figures qui l’ont incarné.
En 1999, les Gao Brothers ont réalisé un montage photographique intitulé « mémoire familiale, 1969-1999 »[9]. Le portrait de Mao, suspendu au fronton de la Cité interdite, était remplacé par deux photos de familles prises à des périodes différentes : l’une datait de 1969, en pleine révolution culturelle, et l’autre, plus récente, avait été prise en 1999. La mère des Gao Brothers y est entourée de ses six fils. L’absence du père souligne, en creux, l’articulation intime entre leur trajectoire personnelle et l’histoire politique de la Chine Populaire.
Ce geste simple qui substitue à une image du pouvoir, figée et intemporelle, le récit historique de citoyens chinois ordinaires possède une puissante vertu performative. À travers cette création, les Gao Brothers rendaient justice à des mémoires individuelles, plurielles, et souvent traumatiques, que l’État-parti a trop longtemps occulté derrière une représentation totalisante et spectaculaire du passé. C’est ce dévoilement-là que craint le régime aujourd’hui.
Le massacre de Tian’anmen en juin 1989 fut un autre moment charnière dans cette imbrication intime entre leur processus créatif et les enjeux politiques et sociaux. À l’époque, si les chars dans Pékin confirment que l’appareil répressif ne faiblira pas devant les contestations les plus tenaces, d’autres évolutions plus profondes vont contribuer à étouffer les velléités politiques des citoyens chinois. Le développement des pratiques de consommation et l’avènement d’une industrie culturelle inoffensive, mais néanmoins plus sophistiquée et attractive que l’ancienne propagande de l’État révolutionnaire, vont jouer leur rôle de distraction et de diversion. La montée de l’individualisme, nourri par la société de concurrence qui accompagne la privatisation de l’économie, va achever de détourner les Chinois de questionnements relatifs à leur avenir commun.
Le champ de l’art contemporain n’a pas totalement échappé à ces évolutions. Les courants dominants de la création après Tian’anmen vont s’inscrire dans une perspective que le critique d’art Li Xianting a qualifiée d’« anti-idéologique », soulignant que « la dissolution de l’idéologie officielle » s’était aussi accompagnée d’une « dissolution de la critique de cette idéologie »[10] .
À rebours de ces tendances, les Gao Brothers vont considérer, à l’époque, que les artistes contemporains chinois doivent assumer pleinement leurs positions politiques en proposant « une critique rationnelle de la réalité sociale », au risque d’entrer en conflit avec l’idéologie officielle[11]. Ils compteront parmi ceux qui, en février 1989, signèrent la lettre ouverte du physicien Fang Lizhi à Deng Xiaoping demandant la libération du militant de la démocratie Wei Jingsheng[12].
Au printemps 1989, avant d’être réprimés, les étudiants s’étaient spontanément réunis devant l’imposant obélisque du « Monument aux héros du peuple » située au centre de la place Tian’anmen. Ils s’appropriaient ainsi ce lieu de mémoire érigé en 1958. Le monument – sur lequel est gravée une épitaphe calligraphiée par Mao qui glorifiait les « héros » qui se sacrifièrent dans « la lutte contre les ennemis intérieurs et extérieurs » – est désormais protégé par la loi inique de 2018.
Les Gao Brothers ont abondamment investi, et contesté, ces espaces symboliques du pouvoir. La monumentale huile sur toile « Image fantôme – La liberté guidant le peuple et le mouvement de la place Tian’anmen en 1989 » (2011) proposait un mélange de motifs empruntés au célèbre tableau de Delacroix avec des références explicites aux événements de la place Tian’anmen, dont le « Monument au héros du peuple » en arrière-plan.
Chez les Gao Brothers, l’histoire n’est pas celle, linéaire et causale, du matérialisme historique. Ils proposent un regard sur le passé où une constellation d’événements viennent s’entrechoquer dans le présent. Leurs citations constituent un acte politique d’actualisation du passé. Les fantômes de Tian’anmen, aidés de l’esprit victorieux de la Révolution de 1830, rachètent le passé et interpellent les vivants afin qu’ils s’emparent, un jour, des potentialités émancipatrices de ces instants.
La juxtaposition de ces représentations sur un unique tableau suggère une histoire commune de la modernité politique, au-delà des spécificités nationales et de l’asymétrie coloniale des relations entre la Chine et l’Occident au cours des deux derniers siècles. Si les Gao Brothers inscrivent leurs créations dans une actualité sociale et politique chinoise, leurs thèmes, leurs références et leur esthétique empruntent à une modernité globale et transnationale dont la Chine est une manifestation parmi d’autres.
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Inscrits dans une tradition vivante d’artistes et d’intellectuels chinois soucieux de rendre visible le déficit démocratique et l’insuffisance des droits fondamentaux en Chine, les Gao Brothers ont toujours maintenu une posture de lanceurs d’alerte, considérant que les artistes et les poètes devaient assumer la « mission sociale des intellectuels » [13]. À l’évidence, cette fonction critique entre en contradiction avec la vocation patriotique que le régime assigne aujourd’hui aux artistes.
À l’heure où en Occident, et particulièrement en France, nous sommes les témoins d’une fragilisation inquiétante des pratiques démocratiques, cette triste affaire nous rappelle qu’en Chine la tendance est au renforcement de logiques qui peuvent désormais de nouveau mériter le qualificatif de totalitaires. La Chine de Xi Jinping revendique fièrement sa puissance et son rayonnement international, mais avec l’arrestation de Gao Zhen, un artiste profondément humaniste et pacifique, elle témoigne autant de son arbitraire que de sa fébrilité.
Malgré les efforts intenses du régime pour contrôler la parole publique et réprimer les velléités de contestation, une partie non-négligeable de la société chinoise est aujourd’hui ouverte sur le monde : les étudiants voyagent, les idées et les pratiques circulent et l’étanchéité de la grande muraille cybernétique n’est pas totale. Le formatage des corps et des esprits, notamment des jeunes générations, n’opère plus avec la même efficacité qu’à l’époque maoïste.
Le systématisme avec lequel le régime efface les représentations alternatives de l’histoire contemporaine révèle peut-être en creux une fragilité, et une peur des dirigeants chinois : que l’amnésie imposée, la censure, les mensonges et les récits falsifiés de l’histoire officielle soient dévoilés par des citoyens chinois mieux informés, plus ouverts, et de moins en moins dupes face à la propagande.
NDA : Merci à Caroline Grillot pour sa relecture attentive et ses conseils avisés.