Politique

Réforme de la fonction publique : les apories du management à la française

Sociologue

Annonce majeure du programme électoral d’Emmanuel Macron en 2017, le projet de loi portant sur la réforme de la fonction publique doit être déposé à la fin du mois de mars. Sans s’avérer le « big bang » fracassant qui viendrait remettre à plat l’ensemble de la fonction publique ou la privatiser sur le modèle suisse, le projet de loi se présente néanmoins comme la boîte à outils d’une évolution néolibérale à la française.

La réforme de la fonction publique est à nouveau à l’honneur avec le dépôt d’un projet de loi pour la fin du mois de mars 2019. Cette réforme était attendue depuis longtemps car elle avait été inscrite dans les priorités du programme électoral d’Emmanuel Macron en 2017 dans la perspective de faciliter la mobilité sociale en France et de sortir d’une logique des « statuts ». Ce projet, qui a déjà fait l’objet de plusieurs modifications, ne constitue sans doute pas à première vue une révolution : rien n’indique que l’on supprime le statut général. Néanmoins l’idée de privatisation y est très présente. Son contenu est en effet disparate et il faut rechercher dans la touffeur juridique les pistes d’une transformation réelle des règles du jeu. Sa lecture attentive montre bien que l’ancien modèle de fonction publique est en voie de dépassement au profit d’une inspiration néolibérale. C’est sans doute pourquoi l’ensemble des organisations syndicales, y compris la CFDT, ont donné un avis négatif à ce projet lorsqu’il a été présenté le vendredi 15 mars au Conseil commun de la fonction publique.

La première caractéristique de ce projet de loi est de renforcer les normes de gestion dans le sens d’une plus grande fermeté hiérarchique tout en faisant appel au vocabulaire managérial. C’est ainsi que « l’encadrant de proximité » voit la palette des sanctions mise à sa disposition s’élargir, incluant désormais pour la fonction publique de l’État (FPE) et la fonction publique hospitalière une exclusion de trois jours sans avis des commissions administratives paritaires (CAP), mesure déjà applicable dans la fonction publique territoriale. On remarque également la volonté de mettre fin aux régimes dérogatoires au temps de travail dans la fonction publique territoriale, accordés par les élus locaux, pour un alignement sur les 1 607 heures de travail annuels. Cette normalisation fait suite à d’intenses controverses sur le temps de travail des agents territoriaux sur la base des rapport


Luc Rouban

Sociologue, Directeur de recherche au CNRS, au Centre de recherche politiques de Sciences Po (CEVIPOF)