Notre-Dame : à qui profite le don ?
En l’espace de quelques jours, des montants colossaux ont été offerts afin d’assurer la reconstruction de Notre-Dame de Paris. Parmi les donateurs de centaines de millions d’euros chacun, les noms de celles et ceux qui occupent depuis longtemps le haut des classements des fortunes en France – Arnault, Bettencourt, Pinault notamment – reviennent en boucle dans les médias. Saluée par le personnel politique, cette manifestation frappante et démesurée de générosité des plus riches intervient alors que, depuis des années, et particulièrement ces derniers mois, les gouvernants n’ont cessé de justifier l’austérité budgétaire et les baisses d’impôt sur les plus fortunés par les risques que ferait courir la mise à contribution de ces derniers pour l’économie du pays.
Au-delà de la singularité de l’événement, comment expliquer que les plus fortunés, si réticents à l’imposition, acceptent de verser de tels montants ? La préférence de ces derniers pour les dons volontaires rencontre directement celle de l’État, qui a mis en place un ensemble de dispositifs témoignant d’une même inclination pour l’économie du don plutôt que pour l’impôt. Les personnes physiques ont ainsi la possibilité de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu à hauteur de 66 % ou de 75 % du montant donné (selon le type de don réalisé). Par la loi de 2003 sur le mécénat d’entreprises, ces dernières bénéficient d’une réduction de l’impôt sur les sociétés à hauteur de 60 % du montant donné. La proposition de l’ancien Ministre de la culture, Jean-Jacques Aillagon, d’étendre cet avantage à 90 % en classant Notre-Dame « trésor national » pousse plus loin cette logique de financement par l’État de l’économie de la générosité.
Les débats autour des dons réalisés par les plus riches se lisent souvent à travers l’opposition entre intéressement et désintéressement. La baisse redoutée et effective des dons[1], suite à la suppression de l’Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et de la niche fiscale q