International

Rwanda, Congo, M23 : les ressorts du conspirationnisme et du négationnisme

Journaliste, Sociologue

Trente ans après le génocide des Tutsis au Rwanda, la couverture médiatique de la région des Grands Lacs africains reste imprégnée d’une idéologie néocoloniale. La résurgence récente du conflit entre le Rwanda et le Congo ravive les thèses racistes et révisionnistes – voire négationnistes – du génocide des Tutsis.

«L’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire » déclarait un ancien président de la République française. À l’occasion de la reprise de Goma et Bukavu par le M23, un groupe armé congolais aux revendications politiques et à l’existence autonome, combien de médias, députés français ou européens, intellectuels ou simples citoyens, qui s’étaient indignés à l’époque des propos de Nicolas Sarkozy, reproduisent aujourd’hui cette même vision infantilisante et méprisante de l’Afrique ?

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Pourquoi ces biais s’accompagnent-ils d’une réactualisation de discours négationnistes ? Trente ans après le génocide des Tutsis rwandais, en quoi la couverture médiatique de l’Afrique des Grands Lacs reste-t-elle largement imprégnée de clichés racistes, hérités de la colonisation et mâtinés de raisonnements calqués sur l’antisémitisme ?

Négationnisme et inversion accusatoire

Avant toute chose, il convient de s’accorder sur le sens des mots. Le terme « négationnisme » fut forgé en 1987 par Henry Rousso afin de permettre aux historiens de démasquer les entreprises de dénégation et de confondre les imposteurs qui, sous couvert de « révision », niaient ou minoraient la Shoah. En France, le négationniste qui a le plus marqué les esprits à la fin des années 1970 est sans doute Robert Faurisson, en niant purement et simplement l’existence des chambres à gaz. Mais il est à noter qu’aujourd’hui, un tribunal pourrait, à raison, considérer que la déclaration « Pétain a sauvé les juifs français » relève du négationnisme. Cette affirmation d’Éric Zemmour, tordant les faits dans une rhétorique inspirée par la défense de Pétain et des proches de Pierre Laval, même sans nier l’existence des chambres à gaz, constitue en effet une « minoration outrancière » des conséquences de la politique antijuive de Vichy.

Concernant le génocide des Tutsis au Rwanda, on pourrait considérer qu’il existe trois formes principales de négationnisme, dont les rhétoriques sont là encore des reprises de la défen


Yoan Gwilman

Journaliste, Étudiant à l'EHESS

Jessica Mwiza

Sociologue, Doctorante à la City University de New-York, activiste franco-rwandaise