En République Démocratique du Congo, avec « les venants »
Avant-dernier roman de l’écrivain sud-africain John Maxwell Coetzee, Une enfance de Jésus (Seuil, 2013) met en scène deux personnages qui se nomment et sont désignés comme « les nouveaux arrivants » : un adulte et un petit garçon qui s’installent à Novilla, une ville occidentale indéfinie aux airs de camp humanitaire et de zone militarisée. Les réfugiés y gagnent l’accès à un toit, à un emploi ou à des services, à la condition qu’ils oublient leur passé pour faire « peau neuve ».

La violence qui leur est infligée ne réside pas forcément dans des atteintes en tant que telles (ils se sentent bien « accueillis »), mais plutôt dans le fait de se voir privés de leur capacité d’agir, de se définir eux-mêmes, d’échapper à leur identité catégorielle de « victimes ». De ce qui leur est arrivé, on sait peu de choses. Ils ont été chassés de chez eux, ont fui à bord d’une embarcation périlleuse. L’homme cherche la mère de l’enfant, ou plutôt quelqu’un qui pourrait l’être, car pour cette part de l’humanité, toute appartenance ou identification (à une famille, à une terre, à une langue, à un nom) semble sujet à caution. « Je n’ai pas le droit d’avoir des exigences », dit l’adulte. Il n’a pas oublié : « Je souffre de souvenirs, ou de l’ombre de souvenirs ».
L’État prend la forme d’un conglomérat d’initiatives privées multiples, visant la conservation des pouvoirs dans le but de l’accumulation des richesses et la sauvegarde des intérêts personnels.
On peut rencontrer des nouveaux arrivants en République démocratique du Congo (RDC). Ils sont parfois appelés les « venants » : ceux et celles qui errent, vagabondent, démunis, étrangers. La langue humanitaire les nomme les « déplacés ». De fait, à la suite de conflits armés récurrents ou prolongés dans plusieurs provinces de la RDC, on estime que plusieurs millions de personnes ont été chassées hors de chez elles, lors de déplacements forcés qui, à interval