Écologie

Les ressourceries à l’épreuve des déchets

Sociologue

L’essor des ressourceries est un des emblèmes du boom du marché de la seconde en main : depuis le début des années 2010, sous l’effet conjugué d’initiatives écologiques et sociales locales et d’une politique publique de réduction des déchets, elles occupent le terrain de l’économie circulaire et solidaire. Mais que font les associations de ces objets en trop ? Qui travaille dans les ressourceries et dans quelles conditions ?

Les premières ressourceries sont apparues en France au milieu des années 1980. Celles et ceux qui en sont à l’origine portaient une critique de la consommation de masse, de la production faramineuse de déchets qu’elle entraîne et des problèmes que posent le traitement de ces rebuts. Elles et ils ont fait de la récupération et du réemploi, non pas un moyen au service d’une autre cause comme Emmaüs, mais une fin en soi.

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L’Adème (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, devenue agence de la transition écologique en 2020), issue en 1991 de la fusion de trois agences indépendantes dont l’Agence nationale pour la récupération et l’élimination des déchets, a très vite soutenu ces nouvelles associations, les aidant à se professionnaliser, à s’institutionnaliser et à se structurer en un réseau national[1]. À sa création en 2000, le réseau compte 7 membres. L’augmentation du nombre de ressourceries est significativement marquée par l’évolution des politiques publiques de gestion des déchets. On observe une première accélération en 2004 à l’occasion du premier plan national de prévention des déchets, comprenant un volet « développement du réseau du réemploi et de réparation des produits ». Alors que 19 organisations adhèrent au réseau national en 2004, elles sont 60 en 2010. À cette date, les États membres de l’Union européenne sont dans l’obligation de transposer une directive qui fait de la prévention et du réemploi la priorité, renversant la hiérarchie du traitement des déchets et reléguant au dernier rang l’élimination, par enfouissement ou incinération[2].

Mais comment faire ? Le système de production est fondamentalement linéaire, enchaînant extraction de ressources, production, consommation, déchétisation. La consigne, exemple notable de réemploi à l’échelle industrielle, est tombée en désuétude; Leboncoin a tout juste 4 ans et Vinted n’est pas encore implanté en France. Le réemploi qui, selon la définition de l’Adème, concerne « toute opérati


[1] Celle, S. (2021). Quelle professionnalisation dans le réemploi des déchets ? Les enseignements paradoxaux d’une ressourcerie en autogestion. Travail et emploi, 166-167(3), 75-102.

[2] Directive 2008/98/CE du 19 novembre 2008.

[3] Collectif Rosa Bonheur, 2017, « Des “inactives” très productives. Le travail de subsistance des femmes de classes populaires », Tracés. Revue de Sciences humaines, n° 32.

[4] Blasco Julien, 2024, « Quelle situation professionnelle après un parcours en insertion par l’activité économique ? », Dares Analyses, n° 9, janvier 2024.

Delphine Corteel

Sociologue, Professeure de sociologie à l’université de Tours, membre du laboratoire CITERES et affiliée au CEET

Notes

[1] Celle, S. (2021). Quelle professionnalisation dans le réemploi des déchets ? Les enseignements paradoxaux d’une ressourcerie en autogestion. Travail et emploi, 166-167(3), 75-102.

[2] Directive 2008/98/CE du 19 novembre 2008.

[3] Collectif Rosa Bonheur, 2017, « Des “inactives” très productives. Le travail de subsistance des femmes de classes populaires », Tracés. Revue de Sciences humaines, n° 32.

[4] Blasco Julien, 2024, « Quelle situation professionnelle après un parcours en insertion par l’activité économique ? », Dares Analyses, n° 9, janvier 2024.