Je ne suis pas un problème administratif
Est-ce de l’ignorance ? De l’indifférence ? Ou est-ce de l’islamophobie inscrite dans les règlements, répétée par des greffiers, mise en scène sous une lumière fluorescente ? Trois semaines après mon arrivée à Paris, j’ai été convoquée pour le renouvellement de mon titre de séjour à la préfecture.

J’ai rassemblé des preuves de mon existence comme un réfugié rassemble son souffle : soigneusement, la peur au ventre de perdre en chemin une pièce du dossier. Je portais mon hijab comme je l’ai toujours porté, non pas comme un argument ni une menace, mais comme une phrase paisible que je me dis lorsque le monde est bruyant.
Mon amie m’a accompagnée. Elle connaît ces salles. Celles où l’État est assis derrière du verre et votre vie devient un numéro sur un ticket. De 10h du matin à 15h passées, nous avons regardé mourir les heures. La salle d’attente sentait le papier et l’hypocrisie. L’air était peuplé d’accents venus de partout, de femmes qui ressemblaient à ma mère, d’un homme dont les chaussures avaient fait trop de pas, d’un bébé qui a pleuré jusqu’à ce que l’épuisement lui enseigne le silence. Les fonctionnaires allaient et venaient pour déjeuner. Lorsque mon numéro s’est enfin affiché, tout était en ordre. En fait, tout s’est passé de manière étonnamment fluide : empreintes digitales, fait. Photo, fait. Timbres, tampons et le cliquetis fatigué d’un clavier officiel qui a tapé plus de refus que de noms. Puis la fonctionnaire a emporté mon dossier dans une arrière-salle, le genre dont les portes ne s’ouvrent que dans un sens. Elle est revenue avec une phrase en français que je n’ai pas saisie, qui visait mon amie comme un petit projectile.
Le visage de mon amie s’est effondré comme s’effondre un drapeau quand le vent s’arrête. « Ils veulent que tu l’enlèves », me dit-elle en portant sa main à ses cheveux puis en indiquant mon hijab. Enlève-le. Là, maintenant, devant des inconnus, pour être photographiée la tête nue cette fois. Une nouvelle image que la Répub
