Série

Le travail et l’amour – sur La Vraie vie de Ekiem Barbier et Guilhem Causse

Critique

La mini-série La Vraie vie, de Ekiem Barbier et Guilhem Causse, est disponible sur Arte depuis le 30 septembre. Prolongement de leur film Knit’s Island et cousine des films Bac à sable (Lucas Azémar et Charlotte Cherici) et Grand Theft Hamlet (Pinny Grylls et Sam Crane), elle rejoue les motifs habituels du « documentaire vidéoludique », nouveau microgenre cinématographique qui commence à trouver son point de chute, mais n’a pas encore atteint son académisme.

Tout documentaire, après tout, a son propre pacte pseudo-fictionnel, sa distance singulière entre filmeur et filmé, son éthique et son esthétique. On se souvient de celle de Knit’s Island, l’île sans fin (2023), qu’avaient déjà réalisé Ekiem Barbier et Guilhem Causse (avec Quentin L’Helgoualc’h, qui participe aussi à cette nouvelle série en tant que filmeur) : les trois documentaristes rejoignaient un serveur « jeu de rôle » (« RP », pour role play) du jeu vidéo DayZ, jeu de survie post-apocalyptique.

publicité

Le dispositif était paradoxalement très direct, linéaire : les cinéastes tenaient le rôle de documentaristes qui documentaient la vie sur cette « île », et partaient à la rencontre de ses habitants, qui ne devinaient pas tout de suite que le trio tournait effectivement un film documentaire. Très vite, le dispositif touchait à un autre but : documenter moins les rôles fictifs tenus par les joueurs que leur vie « hors du jeu », « IRL », in real life, dans « la vraie vie » donc.

Toute l’ambiguïté un peu absurde du RP, celle-là même qui intéresse les cinéastes, est ainsi contenue dans le titre de cette nouvelle série, La Vraie vie, qui se déroule cette fois sur un serveur RP de Arma 3, jeu de tir et de simulation militaire basé sur le même moteur physique que celui de DayZ, c’est-à-dire un moteur à la fois hyperréaliste (les décors et les avatars sont très bien représentés) et aberrant (les mouvements des corps et des véhicules ont quelque chose de trop rapide et de trop net, comme des pantins ou des jouets). Ils font, certes, mine de « jouer le jeu » (voilà l’expression centrale de la série), en ajoutant au dispositif une nouvelle couche : le recrutement d’un acteur, Victor Assié, qui jouerait sur l’île son propre rôle, celui d’un jeune comédien de théâtre, de télévision et de cinéma, à la recherche d’un rôle.

Alors que Knit’s Island, sans être dénué d’humour, cherchait à révéler l’étrange poésie qui caractérise DayZ (il faut dire que l’atmosphère de ce jeu est


Rayonnages

CultureTélévision