Littérature

Des nouvelles de l’Après littérature – sur Le Jour où le désert est entré dans la ville de Guka Han

Critique littéraire

En juin 2018, AOC avait publié le premier texte de Guka Han, née en 1987 en Corée du Sud et arrivée à Paris en 2014. « Fenêtres » est l’une des nouvelles – toutes écrites directement en français – qui compose désormais son premier recueil, Le jour où le désert est entré dans la ville. Elle y déploie, à neuf, le sens nu et lumineux d’une Après littérature.

Tout débute comme à l’aune d’un désastre irréversible mais demeuré sans nom parmi les hommes. Un désastre, reculé à l’aube imprononcée du texte, quelque part avant que le livre ne commence, comme si un désert avant le livre avait envahi la ville et avait, intrépide et aveugle, laissé les femmes et les hommes dans une déshérence sans nombre. Telle est, nue et hagarde, la situation première, l’urzene d’écriture, de Guka Han dans son splendide Le Jour où le désert est entré dans la ville, son premier texte paru en cette rentrée d’hiver aux éditions Verdier dans la collection « Chaoïd ».

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Jeune auteure née en Corée du Sud et installée en France depuis 2014 dont elle parle et écrit désormais la langue, Guka Han déploie d’emblée, à l’entame de son récit, le destin noir d’un monde comme naufragé à lui-même, un monde déchiré d’absence, creusé d’un monde d’après-monde – où, décidément, un cataclysme s’est produit. Pourtant, depuis sa toute violence, il reste innommé car, est-il dit, « personne ne sait comment le désert est entré dans la ville. »

Se dessine alors, depuis le premier chapitre (ou la première nouvelle ?) « Luoes », une puissance cataclysmique qui va traverser tout les chapitres suivants, et qui, dans une sorte de folie irrépressible, innerve la parole depuis une poétique de la catastrophe. Nous sommes dans un Après, un grand Après – de celui qui, depuis quelques années maintenant, traverse la littérature contemporaine et peut, comme je l’ai mis en lumière dans Après la littérature, trouver dans la langue son nom d’Après littérature : de post-littérature.

Mais qu’en serait-il plus précisément chez Guka Han de cette post-littérature qui, d’Antoine Wauters à Célia Houdart en passant par Julia Deck ou Tanguy Viel, dresse une littérature d’après la littérature, une littérature qui, avec vigueur, entend revenir de toutes les morts pour clamer combien le vivant appartient à ceux qui demeurent ? Elle débute dans cet Après qui voit le monde jeté dans une somme


Johan Faerber

Critique littéraire, Co-rédacteur en chef de Diacritik

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