Santé

Covid-19 : les alertes ignorées de la veille sanitaire

Sociologue

Dès ce lundi 20 juillet, le port du masque devient obligatoire dans les lieux publics. La recrudescence des cas de Covid-19 en France fait craindre un scénario de reconfinement comme en Espagne, en Italie ou au Portugal. Un regard rétrospectif et chronologique sur les trois premiers mois de 2020 permet de mieux comprendre l’articulation entre veille sanitaire et décision politique, et ce qui pourrait être amélioré pour arriver à une démocratie sanitaire et politique mature.

Jusqu’à l’épidémie de Covid-19, les grandes crises sanitaires françaises des années 1990 et 2000 étaient le fruit de l’activité de lanceurs d’alerte externes aux autorités sanitaires qui étaient parvenus à publiciser un problème émergent sous-estimé. Lors de l’affaire dite du sang contaminé en 1991, une journaliste d’investigation avait joué ce rôle en signant une série d’articles sur des contaminations de personnes hémophiles par un dérivé du sang administré par le Centre national de transfusion sanguine. Lors de la crise du Médiator de 2009, c’est une pneumologue qui, au moyen d’un livre au titre percutant (Médiator, combien de morts ?), a révélé les effets néfastes pour la santé du médicament des laboratoires Servier.

S’agissant du nouveau coronavirus, rien de tel. Bien au contraire, les autorités, via la veille sanitaire, avaient des informations certes encore parcellaires mais néanmoins alarmistes dès le début du mois de janvier et ce avant tout le monde, notamment les grands médias, qui en étaient réduits à suivre les conférences de presse du ministère de la Santé.

En France, il existe en effet des institutions chargées d’informer les gouvernants sur les risques sanitaires. Héritage de trois décennies de réflexion sur les crises passées, la veille sanitaire est la mission étatique de surveillance et d’alerte sur les dangers menaçant la santé de la population. Cette veille s’incarne dans de nombreuses organisations dont beaucoup étaient mobilisées dès janvier 2020 sur le nouveau virus. C’est le cas de Santé publique France (SPF) et plus généralement des agences de sécurité sanitaire ou de santé. Le ministère de la Santé lui-même tient une veille sur les problèmes de santé émergents, en particulier à la Direction générale de la Santé (DGS). Une des particularités de la situation présente est aussi que la DGS a à sa tête un diplômé de santé publique, Jérôme Salomon, formé à la veille sanitaire.

On ne peut donc pas dire que la crise sanitaire née du Covid-19 résu


[1] Qui diffère ainsi d’une chronologie de la crise faite par ailleurs. Pascal Marichalar, « Première chronologie de l’émergence du Covid-19 », laviedesidees.fr, 25 mars 2020.

[2] À partir des sources contenues sur son site Internet, mises en regard avec les déclarations du ministère de la Santé lors des points presse quotidiens.

[3] Sybille Bernard Stoecklin et al., « First cases of coronavirus disease 2019 (Covid-19) in France: surveillance, investigations and control measures, January 2020 », Euro Surveillance, vol. 25, n°6, 2020.

[4] Joseph T Wu et al., « Nowcasting and forecasting the potential domestic and international spread of the 2019-nCoV outbreak originating in Wuhan, China: a modelling study », The Lancet, corrected version, February 4, 2020; 395: 689–97.

[5] Richard Horton, « Offline: 2019-nCoV—“A desperate plea” », The Lancet, Vol. 395, February 8, 2020.

[6] Elisabeth Mahase, « Coronavirus: global stocks of protective gear are depleted, with demand at “100 times” normal level, WHO warns », BMJ, 368, 2020.

[7] Marc Fadel et al., « Coronavirus outbreak: the role of companies in preparedness and responses », The Lancet, Vol. 5, April 2020.

[8] « Covid-19: too little, too late? », The Lancet, Vol 395 March 7, 2020.

[9] C’est aussi ce qu’avance un épidémiologiste britannique. « Roland Salmon : ‘‘Les données pour soutenir la politique du confinement font défaut’’ », Le Monde, 8 avril 2020.

[10] Michel Callon, Pierre Lascoumes, « Covid-19 et néfaste oubli du principe de précaution », AOC, 27 mars 2020.

Florian Pedrot

Sociologue, Attaché temporaire d’enseignement et de recherche à l’Université de Bretagne Sud, membre associé du Laboratoire d’Etudes et de Recherche en Sociologie (LABERS)

Rayonnages

SociétéSanté

Mots-clés

Covid-19

Notes

[1] Qui diffère ainsi d’une chronologie de la crise faite par ailleurs. Pascal Marichalar, « Première chronologie de l’émergence du Covid-19 », laviedesidees.fr, 25 mars 2020.

[2] À partir des sources contenues sur son site Internet, mises en regard avec les déclarations du ministère de la Santé lors des points presse quotidiens.

[3] Sybille Bernard Stoecklin et al., « First cases of coronavirus disease 2019 (Covid-19) in France: surveillance, investigations and control measures, January 2020 », Euro Surveillance, vol. 25, n°6, 2020.

[4] Joseph T Wu et al., « Nowcasting and forecasting the potential domestic and international spread of the 2019-nCoV outbreak originating in Wuhan, China: a modelling study », The Lancet, corrected version, February 4, 2020; 395: 689–97.

[5] Richard Horton, « Offline: 2019-nCoV—“A desperate plea” », The Lancet, Vol. 395, February 8, 2020.

[6] Elisabeth Mahase, « Coronavirus: global stocks of protective gear are depleted, with demand at “100 times” normal level, WHO warns », BMJ, 368, 2020.

[7] Marc Fadel et al., « Coronavirus outbreak: the role of companies in preparedness and responses », The Lancet, Vol. 5, April 2020.

[8] « Covid-19: too little, too late? », The Lancet, Vol 395 March 7, 2020.

[9] C’est aussi ce qu’avance un épidémiologiste britannique. « Roland Salmon : ‘‘Les données pour soutenir la politique du confinement font défaut’’ », Le Monde, 8 avril 2020.

[10] Michel Callon, Pierre Lascoumes, « Covid-19 et néfaste oubli du principe de précaution », AOC, 27 mars 2020.