Brésil, une immense tache de braise : l’image d’un pays dont le nom brûle
Nous n’avions pas encore, pourrait-on dire, une image suffisamment forte et dramatique pour représenter la ruine du pays dans lequel nous vivons, pour dénoncer le chemin équivoque que nous avons pris, si destructeur et abject. L’image-témoin, l’image-document, l’image-trauma, l’image-symbole, celle qui synthétise l’effondrement et atteste l’exercice le plus cruel de la politique.
Chaque régime néfaste de notre histoire paraît laisser derrière lui une traînée d’images sombres à sa ressemblance. Mais dans le régime actuel, jusqu’à maintenant, tout paraissait resté caché sous la profusion de mots crus, de gestes maladroits, de lois et de projets fondés sur l’arbitraire et le manque de pitié, mais incapables de produire l’impact voulu.
Jusqu’à maintenant. L’ensemble des images qui émergent des incendies simultanés et hors de contrôle dans le Pantanal et en Amazonie a le pouvoir de nous rendre notre capacité à être choqué – ou devrait l’avoir. Une image-synthèse circule sur les réseaux sociaux : le Brésil pris par un satellite de la Nasa, un satellite qui détecte chaque incendie et le marque d’un point rouge sur la carte, le Brésil si consumé par les incendies qu’une immense tâche rouge se forme. Le Brésil en flammes, dans sa chair vive, qui brûle partout. Le Brésil, « cet immense nulle part dont le nom brûle » – l’expression de Caetano Veloso dans Vérité Tropicale est maintenant évoquée par certains avec un sens bien plus immédiat.
Ce que nous voyons, c’est un document scientifique et précis de la dévastation à laquelle nous sommes soumis, et en même temps une puissante métaphore. Le Brésil brûle, littéralement : impossible d’entendre les nouvelles des incendies sans s’alarmer des statistiques féroces, le pays en train de brûler à des niveaux bien supérieurs aux records historiques, la faune et la flore se consumant avec une intensité dévastatrice. Le Brésil brûle symboliquement : impossible d’entendre les nouvelles concernant la politique sans s’alarmer des