Les trois révolutions du télétravail
Directement imputable à la pandémie mondiale, l’explosion du télétravail a perturbé en quelques mois à peine les habitudes d’une grande partie de la population française. Depuis le début du grand renfermement, plusieurs enquêtes ont été menées afin de prendre la mesure d’une telle rupture. Préoccupées avant tout, on le comprend, par les effets immédiats d’une délocalisation du travail jusqu’au domicile des salarié·e·s, aucune de ces investigations n’a encore fait le choix du recul historique.
Afin d’évaluer la portée de la soudaine reconfiguration dont le coronavirus a été le prétexte, il est pourtant intéressant de pousser d’un cran l’horizon de la réflexion. En procédant de la sorte, le télétravail apparaît comme bien plus qu’une simple modalité d’ajustement conjoncturel : il est l’épicentre de trois révolutions de natures différentes.
La première est purement quantitative. Avant la crise sanitaire, une minorité d’actifs et d’actives (entre 2 % et 17 % selon les études et les définitions retenues) œuvrait, à temps plein ou non, à distance de son lieu professionnel de rattachement. Une enquête menée par l’Institut national des études démographiques (Ined) entre le 30 avril et le 4 mai 2020 rapporte que, sept semaines après l’entrée en confinement, 41 % des travailleurs encore en activité œuvraient à domicile. Le bond effectué est à la fois compréhensible et malgré tout quelque peu inattendu.
Compréhensible en raison d’une situation sanitaire qui exigeait des mesures rapides pour limiter les risques de contamination dont les espaces professionnels sont des vecteurs privilégiés. Les incitations du ministère du Travail ainsi que, quinze ans après la précédente, la signature d’un nouvel accord national paritaire sur le sujet (26 novembre 2020) ont probablement stimulé et légitimé le recours à une forme d’organisation grandement boudée jusque-là.
Le travail à distance a, en effet, longtemps peiné à séduire. C’est pourquoi son succès récent mérite d’être consi