Santé

Recadrer l’épidémie de Covid-19 depuis la société et son espace

Médecin Généticienne , Géographe

L’approche timidement déterritorialisée puis le confinement désormais généralisé illustrent l’échec de la stratégie du « cas par cas » défendue par l’exécutif. Comme au Pérou, la gestion de la crise sanitaire s’est faite d’abord de manière centralisée. De nos jours, et le premier effet de surprise passé, il est pourtant possible de s’atteler à la compréhension des dynamiques spatiales de la pandémie. Si l’État ne « voit » qu’à grands traits, alors il faut lui opposer un nouveau regard : celui de la multiscalarité.

La pandémie de Covid-19 a été très diversement abordée par les gouvernements, mais la majorité, dans le monde dit « occidental » (Europe, Amériques, Océanie), a choisi des stratégies de mitigation, plutôt que d’élimination du virus. Les données disponibles sont d’une part provisoires, la pandémie n’étant pas achevée, et d’autre part ne sont pas toutes élaborées sur les mêmes bases. Néanmoins on constate à ce jour (mars 2021) que ces stratégies aboutissent à des taux de mortalité d’ordre de grandeur comparable pour un grand nombre de ces pays : plus de 1 600 décès dus au Covid-19 par million d’habitants aux États-Unis et en Italie, plus de 1 800 au Royaume-Uni, plus de 1 300 en France et au Brésil, près de 1 500 au Mexique et au Pérou, selon les statistiques de Worldometers au 14 mars 2021.

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L’Allemagne, dont la gestion a été citée en exemple lors du premier confinement, déplore tout de même plus de 800 morts par Covid-19 par million d’habitants. Le contraste est net avec les pays ayant choisi une stratégie « Zéro Covid » : l’Australie compte 35 morts dus à la Covid-19 par million d’habitants et la Nouvelle-Zélande, 5. Certes, l’insularité joue certainement, mais pour des îles comme la Guadeloupe le taux de décès par Covid-19 par million d’habitants est néanmoins de plus de 400, pour la Martinique de plus de 100 ; et la Réunion, bien qu’un peu moins affectée selon ce même indicateur, se trouve aujourd’hui en difficulté face aux nécessités d’hospitalisation.

Dans les pays où la contamination est forte, aux conséquences directes de l’épidémie, s’ajoute la déprogrammation de rendez-vous médicaux et d’actes chirurgicaux et plus globalement le déficit de prise en charge des autres maladies. En outre, un nombre important de personnes ont été confrontées à des formes assez graves de la maladie elle-même et à ses séquelles, ainsi qu’au décès brutal et imprévu de proches, d’amis, de connaissances et de patients. Plus généralement, du fait d’une diversité de facettes


[1] Voir R. Brunet, Les villes « européennes », Reclus-Datar, 1989.

[2] Des études sont en cours sur cette question. Voir par exemple l’enquête Epicov.

[3] Barbara Stiegler, De la démocratie en pandémie. Santé, recherche, éducation, Tracts Gallimard, 2021

Annie Lévy-Mozziconacci

Médecin Généticienne , membre du collectif Norcovid, CHU de Marseille

Évelyne Mesclier

Géographe, Directrice de recherches à l’IRD, UMR Prodig

Mots-clés

Covid-19

Notes

[1] Voir R. Brunet, Les villes « européennes », Reclus-Datar, 1989.

[2] Des études sont en cours sur cette question. Voir par exemple l’enquête Epicov.

[3] Barbara Stiegler, De la démocratie en pandémie. Santé, recherche, éducation, Tracts Gallimard, 2021