La Diagonale du désir, autoportrait d’une baronne perchée
Sinziana Ravini enseigne l’esthétique à la Sorbonne, co-dirige la revue suédoise d’art contemporain Paletten, est commissaire d’expositions, et donc, écrit. Paru ce printemps, son premier roman – La Diagonale du désir ou les aventures d’une femme en quête de son propre désir sur fond de rupture amoureuse – ne se donne pas à lire comme une incartade mais bien plutôt comme une nouvelle proposition artistique, à inscrire dans la suite de performances composites antérieures (The Black Moon, Aphrodisia…) qui déjà interrogeaient la psyché féminine. Echappant à toute catégorisation, La Diagonale du désir oblique entre l’autofiction, le roman picaresque, le récit d’initiation érotique et le conte philosophique.
On entre dans ce texte comme dans un cabinet de curiosités, disposé à toutes les bizarreries qui nous attendent au gré des rencontres et des voyages de la narratrice. Des quais de Seine aux rives du Bosphore en passant par les canaux vénitiens, de la skyline métallique de New York au havre d’un arbre fendu, du cabinet d’un psy à une loge franc-maçonne, Sinziana Ravini explose l’unité de lieu, et c’est peut-être autant pour révéler la fuite en avant de son héroïne – car c’en est une, au même titre que Don Quichotte, Arthur, Candide ou Gulliver – que pour faire perdre pied à son lecteur. Brouilleuse de cartes comme aimait à se voir Georges Bataille qu’elle a choisi en épigraphe, elle n’a de cesse d’épaissir l’énigme qui sous-tend le programme autofictionnel.
Prétextant un « manque de courage et d’imagination », la narratrice s’invente un double, Madame X, qui ira à sa place explorer le continent noir. Ainsi rebaptisée et enhardie, celle qui se plaint à plusieurs reprises d’être « aliénée », de « désirer tout donc rien », parvient à convaincre un psychanalyste de se prêter à son jeu, puis une dizaine de femmes, qu’elle nomme ses muses, de lui confier des missions pour déterminer l’action du roman. Pour qu’un jeu soit amusant, surtout lorsqu’il s’agit d’une ch