Cinéma

« De bien regarder, je crois que cela s’apprend » – sur Gagarine de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh

Critique

Film lunaire, Gagarine offre un (contre)point de vue saisissant à ce qu’il est coutume de voir (ou de ne pas voir) dans la production dominante des images de la périphérie urbaine, en particulier si l’on considère le remous suscité par la question d’un journaliste britannique lors de la conférence de presse du film Bac Nord à Cannes.

«Après avoir vu votre film, je me suis dit que j’allais voter Le Pen, déclare sans détour le journaliste de l’AFP anglophone en ouverture de sa question. Vous représentez les gens comme des animaux.» Sur scène, le personnel de Bac Nord, film inspiré par l’affaire des stupéfiants marseillais de 2012 et présent cette année au Festival de Cannes en hors-compétition, éclate de rire.

Le cinéaste, Cédric Jimenez, se défend de prendre parti pour la police, soulignant l’abandon social dont souffrent les Quartiers Nords et temporise, reconnaissant que les policiers qu’il filme n’ont pas affaire à l’ensemble des personnes qui habitent cet espace : « C’est un point de vue, c’est un angle. » Puis « Je ne fais pas un panorama complet des Quartiers Nords, c’est évidemment très focus sur une affaire… » et Gilles Lelouche de conclure : « C’est pas une radiographie exacte des faits, c’est aussi un Western urbain avec tout ce que ça représente de mystification et de fictionnalisation et de cinéma, ce n’est pas la réalité. »

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Les métaphores optiques auxquelles ont recours les deux hommes pour défendre leur position résonnent étrangement avec les multiples appareils de vision qu’utilise Youri, le personnage de Gagarine, à des fins totalement différentes. Le jeune homme, passionné d’électronique et de bricolage, rêve d’espace depuis la fenêtre de l’appartement qu’il occupe seul, depuis le départ de sa mère, dans un immeuble de la cité Gagarine. Avec l’aide de son voisin Houssam et de Diana, jeune Rome habitant un terrain proche, il tente dans un premier temps d’empêcher la destruction programmée du grand ensemble en réparant frénétiquement ses équipements obsolètes, en vain. Alors que les ouvriers commencent à investir la cité, Youri entreprend de se confectionner sa propre station spatiale dans les tunnels aménagés dans la carcasse de son immeuble, en attendant la catastrophe.

Mais le véritable but que paraît poursuivre Youri dépasse la culture de légumes en atmosphère artific


Occitane Lacurie

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