D’où viens-tu Chris Ware (et où mènes-tu) ?
Cela devenait une plaisanterie, un running joke comme le monde de la bande dessinée aime en produire, à répétition : depuis plusieurs années, l’attribution du grand prix du festival d’Angoulême au dessinateur et auteur américain Chris Ware s’entendait comme certaine avant d’être, à chaque fois, disqualifiée.
Chris Ware, croyait-on, n’aurait jamais ce prix, attribué par le vote de ses pairs et avec lequel vient la présidence du festival : à l’auteur élu de donner la direction de son édition, d’imposer sa vision. De montrer aussi où en est la bande dessinée : les meilleures éditions de ce festival, l’un des plus populaires pour le genre, en France et dans le monde, ont souvent été ainsi, captant un moment de l’évolution de la BD, dans tous les sens possibles – du plus populaire au plus pointu, du roman graphique au manga.

Il y a une dizaine d’années, l’émergence d’une bande dessinée indépendante, américaine et française, avait été l’occasion de voir au festival des auteurs américains importants comme Daniel Clowes, Charles Burns ou encore Adrien Tomine et le canadien Seth. Chris Ware aussi y est passé : ces auteurs sont familiers de ce festival. Mais plus que tout, Angoulême est familier de Chris Ware, dans le sens où toutes les innovations passées ces dernières années dans ce festival pourraient être résumées dans l’œuvre qu’il parsème subrepticement depuis la sortie en 1993 du premier numéro de son comics Acme Novelty Library dans lequel il publie, de façon irrégulière, des extraits de bandes dessinées qui, rassemblées, donnent lieu à des livres plus conséquents.
C’est ainsi que les premiers numéros d’Acme ont été les laboratoires de livres assez saisissants comme le toujours étonnant Quimby the Mouse et, surtout, le livre qui a fait connaitre Ware dans le monde entier, Jimmy Corrigan. Les numéros plus tardifs d’Acme, sortis après Jimmy Corrigan, dans les années 2000 et 2010, ont quant à eux été la source du livre le plus récent de l’auteur, Rusty Brown.
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