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L’Allemagne post-Merkel ou la fin annoncée de l’ère des deux grands partis de masse

Historien

Outre-Rhin, l’issue des élections législatives qui se tiendront le 26 septembre est incertaine : qui prendra la succession d’Angela Merkel, dans un contexte d’inexorable déclin des deux grands partis qui structuraient la vie politique allemande jusqu’alors ? À force d’être le nez collé sur les sondages et de personnaliser à outrance la campagne électorale, la plupart des commentateurs allemands et étrangers passent à côté des principaux enjeux de cette élection.

En décidant de mettre un terme à sa carrière politique à l’issue de son quatrième mandat comme Chancelière sans avoir réellement assuré sa potentielle succession, Angela Merkel a rendu les élections législatives du 26 septembre 2021 plus incertaines que jamais. Pour la première fois dans l’histoire de la République fédérale d’Allemagne, la succession à la Chancellerie est pleinement ouverte. Cette incertitude, couplée à un contexte d’instabilité très élevée tant sur le plan géopolitique que sur les plans économique et sanitaire, rend a priori cette campagne électorale particulièrement intéressante à suivre.

À la différence des élections de 1998 où les Allemands mirent fin au « règne » de seize ans d’Helmut Kohl, émettant le souhait, avec le gouvernement de coalition rouge-vert de Gerhard Schröder, d’un changement de génération et de ligne politique, force est de constater que l’heure n’est pas au renouveau. Comme si l’Allemagne ne semblait pas prête, ni sur le plan idéologique, ni sur le plan générationnel, à oser soit plus d’État, soit plus d’intégration européenne ou plus d’écologie.

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Alors que les défis s’accumulent depuis plusieurs mois jusqu’à prendre au mois de juillet la forme agressive d’inondations meurtrières, la campagne électorale, telle qu’elle se déploie depuis cet été, met en avant non pas une figure du changement et du parti que la candidate des Verts Annalena Baerbock aurait pu incarner, mais plutôt une figure « merkelienne » de la continuité : Olaf Scholz, candidat malheureux à la direction du parti social-démocrate à l’automne 2019. Désavoué par une base militante qui souhaitait tourner la page des années néo-libérales incarnées par l’agenda 2010 de Gerhard Schröder, Olaf Scholz apparaît de plus en plus comme le postulant le plus crédible pour diriger le prochain gouvernement.

En choisissant d’inscrire ses pas dans ceux de l’actuelle chancelière (jusqu’à s’approprier non sans un certain humour la célèbre gestuelle du losange de Merkel pou


[1] B. Amable, S. Palombarini, L’illusion du bloc bourgeois. Alliances sociales et avenir du modèle français, Paris, Raisons d’agir, 2017.

Emmanuel Droit

Historien, Professeur d’histoire contemporaine à Sciences Po Strasbourg

Notes

[1] B. Amable, S. Palombarini, L’illusion du bloc bourgeois. Alliances sociales et avenir du modèle français, Paris, Raisons d’agir, 2017.