International

Coalition « feux tricolores » : plus de continuité que de changement en Allemagne ?

Germaniste

Une quinzaine de jours après les élections fédérales allemandes, où les sociaux-démocrates du SPD sont arrivés en tête, suivis par les Libéraux et les Verts, les trois partis ont annoncé être parvenus à un accord préliminaire en vue de former un gouvernement. Si cette alliance est inédite, le programme, lui, ne semble pas faire rupture, si ce n’est par quelques ouvertures sur la lutte contre le dérèglement climatique.

Un mois jour pour jour après les élections fédérales du 26 septembre, le Bundestag s’est réuni en séance constitutive à Berlin. Il compte 736 députés, plus que jamais auparavant, incapable que l’assemblée précédente a été de réformer la loi électorale sur l’injonction déjà ancienne (2012) du Tribunal fédéral constitutionnel et d’en réduire le nombre.

publicité

Le Bundestag pourrait ne compter que 598 sièges, soit deux fois le nombre des circonscriptions électorales, il en a compté 709 de 2017 à 2021. Il continue donc de grossir de façon démesurée. C’est le résultat d’un complexe mode de scrutin personnalisé à la proportionnelle mais surtout du principe édicté par le tribunal fédéral constitutionnel de Karlsruhe qui veut que chaque voix exprimée par les électeurs ait le même poids dans la répartition des sièges[1].

Olaf Scholz devrait, sauf imprévu, être élu chancelier d’ici Noël.

Le nouveau parlement fédéral est sensiblement plus jeune, plus féminisé et plus diversifié que le précédent : la moyenne d’âge des députés est passée de 49 à 47 ans, les plus âgés se trouvant dans le groupe parlementaire du parti d’extrême droite AfD avec une moyenne d’âge de 51 ans contre 42 ans pour les Verts.

Pour ce qui est de la représentation des femmes, celle-ci ne progresse que légèrement (de 30,7 % à 34,7 %), mais elle a déjà été plus élevée dans le passé (36,5 % en 2011). Malgré leur recherche d’une représentation aussi égale que possible entre hommes et femmes, le groupe parlementaire social-démocrate ne compte que 42 % de femmes contre une proportion de 54 % pour Die Linke et 58 % pour les Verts. Ces chiffres sont de 24 % pour les Libéraux, 23 % pour les Chrétiens-démocrates et, loin derrière tous les autres partis, de 13 % à l’AfD[2].

Ces chiffres sont assez représentatifs de l’ouverture au progrès de société des partis représentés au Bundestag, et en particulier des partis qui négocient actuellement un contrat de gouvernement pour constituer une coalition dirigée par le parti


[1] Le mode de scrutin accorde deux vois à chaque électeur : par la première celui-ci vote pour un candidat dans sa circonscription ; par la seconde il vote pour une liste présentée par un parti. Le pays comprenant 299 circonscriptions, les députés élus au titre de la première voix le sont au scrutin majoritaire personnalisé. Mais la répartition de l’ensemble des sièges se fait à la proportionnelle par Land à partir des résultats obtenus au titre de la 2e voix. Le risque que ce mode de scrutin à la proportionnelle provoque une dispersion des voix sur un trop grand nombre de partis a conduit le législateur à introduire en 1953 une clause de 5 % au niveau national en dessous de laquelle un parti n’est pas représenté au Bundestag – sauf obtention de trois mandats directs dans les circonscriptions, règle qui bénéficie cette fois encore à Die Linke qui, bien que n’ayant obtenu que 4,9 % des voix a 39 députés au Bundestag. La répartition des sièges au niveau des Länder peut avoir pour effet qu’un parti obtienne plus de sièges au titre de la 1ère voix (mandats acquis dans les circonscriptions) que son score global ne lui en attribue au titre de la 2e. Dans un Land comme la Bavière où la CSU reste fortement implantée, celle-ci a remporté 45 mandats directs – qui ne peuvent lui être contestés – alors qu’au titre de la 2e voix elle ne devrait en avoir que 34. La CSU bénéficie ainsi de 12 mandats dits « surnuméraires » (Überhangmandate). Pour rétablir l’équilibre entre les partis au niveau fédéral, le Bundestag a introduit en 2009 des mandats dits « complémentaires » (Ausgleichmandate) pour les autres partis. C’est cette recherche de l’équilibre qui produit cette inflation du nombre des députés au Bundestag. Lors de son discours d’adieu en tant que parlementaire et président sortant du Bundestag, Wolfgang Schäuble a demandé aux députés de se mettre d’accord sur une réduction de leur nombre qui soit conforme à la Constitution.

[2] Chiffres du Deutscher Bundestag, repris dans De

Jérôme Vaillant

Germaniste, Professeur émérite de l’Université de Lille

Notes

[1] Le mode de scrutin accorde deux vois à chaque électeur : par la première celui-ci vote pour un candidat dans sa circonscription ; par la seconde il vote pour une liste présentée par un parti. Le pays comprenant 299 circonscriptions, les députés élus au titre de la première voix le sont au scrutin majoritaire personnalisé. Mais la répartition de l’ensemble des sièges se fait à la proportionnelle par Land à partir des résultats obtenus au titre de la 2e voix. Le risque que ce mode de scrutin à la proportionnelle provoque une dispersion des voix sur un trop grand nombre de partis a conduit le législateur à introduire en 1953 une clause de 5 % au niveau national en dessous de laquelle un parti n’est pas représenté au Bundestag – sauf obtention de trois mandats directs dans les circonscriptions, règle qui bénéficie cette fois encore à Die Linke qui, bien que n’ayant obtenu que 4,9 % des voix a 39 députés au Bundestag. La répartition des sièges au niveau des Länder peut avoir pour effet qu’un parti obtienne plus de sièges au titre de la 1ère voix (mandats acquis dans les circonscriptions) que son score global ne lui en attribue au titre de la 2e. Dans un Land comme la Bavière où la CSU reste fortement implantée, celle-ci a remporté 45 mandats directs – qui ne peuvent lui être contestés – alors qu’au titre de la 2e voix elle ne devrait en avoir que 34. La CSU bénéficie ainsi de 12 mandats dits « surnuméraires » (Überhangmandate). Pour rétablir l’équilibre entre les partis au niveau fédéral, le Bundestag a introduit en 2009 des mandats dits « complémentaires » (Ausgleichmandate) pour les autres partis. C’est cette recherche de l’équilibre qui produit cette inflation du nombre des députés au Bundestag. Lors de son discours d’adieu en tant que parlementaire et président sortant du Bundestag, Wolfgang Schäuble a demandé aux députés de se mettre d’accord sur une réduction de leur nombre qui soit conforme à la Constitution.

[2] Chiffres du Deutscher Bundestag, repris dans De