International

Aux États-Unis, la société divisée face aux justiciers blancs

Historien

Aux États-Unis, le mois de novembre a été rythmé par deux procès suivis de près par l’opinion publique et mettant en exergue, chacun à leur façon, les divisions qui traversent la société américaine à propos de la question raciale. Dans les deux affaires, des hommes blancs ont tué, en plaidant la légitime défense. Ces citoyens armés au nom de leur protection incarnent la figure du justicier blanc, ancrée dans une mythologie individualiste et viriliste, et dopée depuis cinquante ans par le puissant lobbying pro-armes.

En moins d’une semaine aux États-Unis, les jurés ont rendu leur verdict dans deux procès pour meurtre qui ont été massivement suivis par l’opinion publique. Dans le Wisconsin, au nord-ouest du pays, un jeune homme blanc, Kyle Rittenhouse, a été reconnu non-coupable alors qu’il avait tiré sur trois personnes, en tuant deux, à l’été 2020. En Géorgie, dans le sud, les trois hommes blancs qui avaient poursuivi, stoppé et abattu un joggeur noir, Ahmaud Arbery, ont en revanche été reconnus coupables de meurtre, et encourent désormais la réclusion criminelle à perpétuité.

publicité

Ces deux affaires à l’issue radicalement opposée ont été jugées dans deux des États les plus âprement disputés de la dernière élection présidentielle : le Wisconsin et la Géorgie. Dans les deux cas, des hommes blancs armés ont prétendu agir par légitime défense. À Kenosha comme à Brunswick, des vidéos des meurtres commis ont captivé et mobilisé l’opinion publique tout en obligeant le système judiciaire, parfois à contrecœur, à agir. Les deux procès très intensément suivis, observés et commentés ont, une fois de plus, mis en exergue les divisions et les tensions qui traversent l’Amérique un an après la victoire de Joe Biden sur Donald Trump.

Achevé le premier, vendredi 19 novembre, mais concernant des faits plus récents, commis à l’été 2020, le procès de Kyle Rittenhouse posait clairement la question de la légitime défense mais aussi d’une société étatsunienne transformée par un demi-siècle de lobbying pro-armes et de violences.

Kenosha, petite ville du Wisconsin à une cinquantaine de kilomètres de Chicago, connaît à l’été 2020 une série de manifestations antiracistes et antipolicières après qu’un officier blanc a grièvement blessé un jeune conducteur africain-américain qui refusait d’être arrêté. Quelques semaines après la mort de George Floyd, cette nouvelle affaire venait ranimer la colère d’une partie de la jeunesse, notamment africaine-américaine, contre la police. Aux manifestations diurnes


Simon Grivet

Historien, Maître de conférences à l'Université de Lille