Politique

Le Conseil constitutionnel, sujet d’inquiétude

Juriste

Les conditions de nomination et la compétence des trois nouveaux membres du Conseil constitutionnel ont fait l’objet de critiques acerbes et bien souvent justifiées. Mais il y a plus inquiétant : le caractère monocolore (de droite) de cette institution et, plus encore, son mode de production des décisions, qui réserve une place déterminante à des conseillers informels.

L’annonce de trois nouvelles nominations au Conseil constitutionnel (Jacqueline Gourault, Véronique Malbec et François Séners) pour remplacer Claire Bazy-Malaurie, Nicole Maestracci et Dominique Lottin n’a pas manqué de susciter des critiques, justifiées bien souvent, portant sur leurs conditions de nomination, ou leur compétence. Nous souhaitons ici prendre une autre perspective sur ce sujet. À partir d’une analyse sociologique du Conseil et de l’impact possible des nominations sur les équilibres, notamment politiques, de l’institution, nous voudrions dans un premier temps réfléchir de façon prospective à l’impact possible de ces nominations sur la politique juridique du Conseil.

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Alors qu’aux États-Unis, l’opinion publique s’inquiète d’une Cour suprême qui bascule à droite, la France semble ne pas comprendre qu’il ne reste qu’un homme de gauche au Conseil constitutionnel, en la personne de son président.

Il faudra ensuite relativiser l’importance de ces nominations en exposant la façon dont travaille le Conseil. La structure du Conseil constitutionnel tend à marginaliser le pouvoir des juges dans la fabrication de la décision.

Enfin, puisque la question de la place des professeurs de droit est posée dans les débats, nous nous permettrons quelques commentaires sur la place, en réalité importante mais méconnue, des professeurs de droit dans la prise de décision, à partir des archives. Ils sont bien présents, mais ils ne sont en effet pas là où on les attend.

Le juge constitutionnel français, on le verra, diffère fortement des autres juridictions françaises et de ses homologues étrangers. Le choix français de laisser la Constitution entre les mains d’une juridiction très imparfaite interroge. Mais, on le verra, la question de la compétence des juges est en réalité le moindre des problèmes que pose l’institution. Il faudra donc méditer à ce que tout cela dit de nos institutions réelles et de la Ve République.

Sociologie du Conseil constitutionnel officiel

J


[1] Nicolas Bau et Liora Israël, « Quelques éclairages sociologiques sur la composition du Conseil constitutionnel », in Le Conseil constitutionnel à l’épreuve de la déontologie et de la transparence, Elina Lemaire, Thomas Perroud [dir.], Institut Francophone pour la Justice et la Démocratie, à paraître

[2] Une sociologue au Conseil Constitutionnel, Gallimard, Coll. NRF Essais, 2010

[3] C. Bosvieux-Onyekwelu, « Conseil d’État et Conseil constitutionnel : proximité et conflits d’intérêts au sein de l’élite au pouvoir », in Le Conseil constitutionnel à l’épreuve de la déontologie et de la transparence, Elina Lemaire, Thomas Perroud [dir.], Institut Francophone pour la Justice et la Démocratie, à paraître

[4] T. Perroud, « Le Conseil constitutionnel contre la transparence », JP Blog, 16 décembre 2016

[5] « Judicial Independence Under a Divided Polity. A Study of the Rulings of the French Constitutional Court, 1959-2006 », Journal of Law, Economics and Organization, 2009, 25, n° 1, p. 262-284, « Judicial Independence and the Validity of Controverted Elections », American Law and Economies Review, 2010, 12, n°2, p. 423-461

[6] « L’indépendance du Conseil constitutionnel français en question », Les Cahiers de la Justice, 2015, n° 4, p. 547-561

[7] Thomas Perroud, « La neutralité procédurale du Conseil constitutionnel », La Revue des droits de l’Homme, n° 15-2019

[8] T. Perroud, « Un choix de société du Conseil constitutionnel : la liberté contractuelle contre la solidarité », JP Blog, 20 février 2017

[9] T. Perroud, « Le Conseil constitutionnel contre la transparence », JP Blog, 16 décembre 2016

[10] O. Renaudie, « Les organes informels », in L’informel en droit administratif, Colloque de l’AFDA, 10 décembre 2021

[11] O. Duhamel, N. Molfessis, « Avec le RIP, le Conseil constitutionnel joue avec le feu », Le Monde, 14 mai 2019

[12] J. Chacornac, P. Conte, « Les titres universitaires et le service juridique du Conseil constitutionnel. Là où la loi ne distingue pas, le techn

Thomas Perroud

Juriste, Professeur de droit public à l’Université Panthéon-Assas

Notes

[1] Nicolas Bau et Liora Israël, « Quelques éclairages sociologiques sur la composition du Conseil constitutionnel », in Le Conseil constitutionnel à l’épreuve de la déontologie et de la transparence, Elina Lemaire, Thomas Perroud [dir.], Institut Francophone pour la Justice et la Démocratie, à paraître

[2] Une sociologue au Conseil Constitutionnel, Gallimard, Coll. NRF Essais, 2010

[3] C. Bosvieux-Onyekwelu, « Conseil d’État et Conseil constitutionnel : proximité et conflits d’intérêts au sein de l’élite au pouvoir », in Le Conseil constitutionnel à l’épreuve de la déontologie et de la transparence, Elina Lemaire, Thomas Perroud [dir.], Institut Francophone pour la Justice et la Démocratie, à paraître

[4] T. Perroud, « Le Conseil constitutionnel contre la transparence », JP Blog, 16 décembre 2016

[5] « Judicial Independence Under a Divided Polity. A Study of the Rulings of the French Constitutional Court, 1959-2006 », Journal of Law, Economics and Organization, 2009, 25, n° 1, p. 262-284, « Judicial Independence and the Validity of Controverted Elections », American Law and Economies Review, 2010, 12, n°2, p. 423-461

[6] « L’indépendance du Conseil constitutionnel français en question », Les Cahiers de la Justice, 2015, n° 4, p. 547-561

[7] Thomas Perroud, « La neutralité procédurale du Conseil constitutionnel », La Revue des droits de l’Homme, n° 15-2019

[8] T. Perroud, « Un choix de société du Conseil constitutionnel : la liberté contractuelle contre la solidarité », JP Blog, 20 février 2017

[9] T. Perroud, « Le Conseil constitutionnel contre la transparence », JP Blog, 16 décembre 2016

[10] O. Renaudie, « Les organes informels », in L’informel en droit administratif, Colloque de l’AFDA, 10 décembre 2021

[11] O. Duhamel, N. Molfessis, « Avec le RIP, le Conseil constitutionnel joue avec le feu », Le Monde, 14 mai 2019

[12] J. Chacornac, P. Conte, « Les titres universitaires et le service juridique du Conseil constitutionnel. Là où la loi ne distingue pas, le techn