Retour sur l’élection présidentielle dans les quartiers populaires
« Le jour du vote, ce qu’il s’est passé, c’est que les petits ils se sont engrainés… Ça s’est fait comme ça. On dirait qu’ils voulaient se faire un 2005, mais en mode bon délire… » De cet extrait d’entretien, récolté dans le cadre d’une enquête au long cours auprès de personnalités engagées dans les quartiers populaires, surgit magiquement le lien entre la mobilisation électorale dans les quartiers le jour du premier tour de la présidentielle et les émeutes de novembre 2005.
S’y exprime un point de vue « de l’intérieur » sur un fait marquant du dernier scrutin présidentiel : les scores très importants, sinon stratosphériques dans certains bureaux de vote, de Jean-Luc Mélenchon sur les territoires populaires des grandes agglomérations. Dans cette continuité historique revendiquée au détour d’une remarque presque humoristique réside une part de la signification politique du phénomène traversé.

46 % à Corbeil-Essonnes (91), 57 % à Grigny (91), 45 % à Vitry-sur-Seine (94), 49 % à Ivry-sur-Seine (94), 60 % à Bobigny (93), 61 % à Aubervilliers (93), 54 % à Vaulx-en-Velin (69), 52 % à Roubaix (59)… Les chiffres donnent le tournis. Ces territoires stigmatisés et souvent abandonnés par la politique traditionnelle ont soudain acquis une valeur nouvelle, ressentie par exemple dans les négociations sur les investitures aux élections législatives. D’une certaine manière, les quartiers populaires et leurs habitants reviennent là au cœur de l’attention de la gauche.
Cette position centrale n’est pas nouvelle : le Parti communiste, et dans une moindre mesure le Parti socialiste, ont constitué leur socle pratique et symbolique à partir de ces territoires populaires. Espaces d’émulation et de mobilisation militante, de conquête sociale (et non de reconquête), les banlieues « rouges » et plus largement les quartiers populaires donnaient à voir un modèle positif d’implantation politique et culturelle qui revendiquait le rôle moteur des classes populaires.
L’effondrement relat