Politique culturelle

Mirjam Brusius : « La préservation implique toujours une part de destruction »

Historien de l’art

En écho aux nombreuses actualités concernant l’héritage colonial des musées occidentaux, Mirjam Brusius explore l’histoire, le rôle et les potentiels inexploités de ces institutions dans la construction de notre rapport au passé. Au tempo de la recherche et du dialogue, l’historienne des sciences et du colonialisme y défriche de nouvelles voies, divulgue le fruit de ses travaux et partage ses expériences collectives, sans jamais quitter des yeux le présent.

Historienne des sciences et du colonialisme, tout récemment lauréate du prestigieux Dan David Prize, Mirjam Brusius mène depuis plusieurs années des recherches importantes sur la circulation des objets et des images entre l’Europe, le Moyen-Orient et l’Asie du Sud. Ses travaux protéiformes portent sur l’histoire des pratiques archéologiques et la mobilité des artefacts, sans pour autant perdre de vue les récits pluriels et les mémoires qu’ils charrient avec eux. Attentive aux mouvements décoloniaux, portée par une réflexion permanente sur les outils d’élaboration et les conditions d’émergence du savoir, Mirjam Brusius observe depuis Londres, où elle est actuellement chercheuse à l’Institut historique allemand, les débats vivaces sur l’héritage colonial des musées.

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Dans cet entretien, qui éclaire certaines problématiques patrimoniales réactivées par le discours tenu par Emmanuel Macron à Ouagadougou en 2017, l’historienne explore de nouvelles pistes afin de stimuler notre rapport au passé par le biais de la culture matérielle. En partageant les conclusions de ses recherches comme ses expériences professionnelles, elle appelle à une reconfiguration des pratiques muséales, à une refonte plus humaine des modalités de présentation des objets, ainsi qu’à une répartition plus équitable des connaissances. Un lot d’intentions qui constitue, avec d’autres, la ligne de force d’un des projets qu’elle a contribué à initier : « 100 histoires de 100 mondes en 1 objet » Derrière ce titre, qui détourne celui d’une émission de radio britannique coproduite par le British Museum et le best-seller qui en est issu (Une Histoire du monde en 100 objets), se trouve un groupe de réflexion aventureux ainsi qu’une plateforme en ligne où les objets se racontent autrement, c’est-à-dire indépendamment des narrations institutionnelles. VC

Ces dernières années ont été marquées par l’émergence d’un débat public très intense sur l’héritage colonial des musées occidentaux, notamment autour d


Victor Claass

Historien de l’art, Critique d'art, coordinateur scientifique à l’Institut national d’histoire de l’art