La République réactionnaire et la normalisation de l’extrême droite
La candidature d’Éric Zemmour lors de l’élection présidentielle de 2022 sembla autant choquer que se dérouler finalement dans une atmosphère résignée. Le journaliste « polémique » avait choisi depuis longtemps son camp et n’avait en effet jamais caché ses penchants pour les politiques les plus extrêmes comme le montrait déjà son livre Le Premier Sexe en 2006. En effet, quiconque ayant pris la peine de le lire aurait su que le mélange de racisme, de sexisme et d’homophobie était au cœur de la politique et des théories du complot de Zemmour. Son premier best-seller, Le Suicide français (2014), aurait dû avertir tout un chacun que ce penchant nostalgique pour le fascisme était mûrement réfléchi, car l’on n’entreprend pas de réhabiliter le Maréchal Pétain sans vouloir réhabiliter ses idées.

La vidéo de lancement de sa campagne épousait donc logiquement de nombreux éléments définitionnels du fascisme, que ce soit le principe de renaissance (ou palingénésie), une violence autant verbale que physique, le principe du chef, le racisme, un confusionnisme mêlant libéralisme, capitalisme et gauche, tous vu comme responsables des malheurs des Français.es, et un appel à la classe moyenne basse.
Pour comprendre ce basculement vers des idéologies de plus en plus extrêmes à droite, il est absolument essentiel de ne pas se focaliser sur le moment présent, mais de prendre du recul par rapport aux acteurs eux-mêmes.
Le fait que le Rassemblement national se retrouve en 2022 avec 89 députés, malgré un système électoral censé protéger de l’extrême droite, n’est pas tant un séisme qu’une lente érosion de la démocratie. Au-delà de Le Pen et Zemmour – car il serait trompeur de penser qu’ils sont finalement les acteur.rice.s principal.e.s de leur propre « succès » –, il nous faut également nous pencher sur le rôle qu’ont joué les élites hégémoniques par leur accès privilégié au discours public.
La montée de l’extrême droite ne tire pas sa source d’une simple poussée populaire. C’est