Société

Coupe du monde de football, le contrôle du genre

Socio-historienne

Du 7 juin au 7 juillet, la France accueille la coupe du monde féminine de football, et non la coupe du monde de football féminin comme on l’entend encore. Mêmes règles, même engagement physique et technique, les joueuses qui s’affronteront ne pratiquent pas un sport spécifique. Mais la bicatégorisation sexuée dans le sport véhicule encore beaucoup de stéréotypes, comme celle d’une hiérarchie biologique des corps qu’il s’agit encore et toujours de déconstruire.

Le 7 juin 2019, l’équipe de France de football de femmes jouera le match d’ouverture de la Coupe du Monde, contre la République de Corée, au Parc des Princes. Parmi les joueuses sélectionnées, ne figurera pas Park Eun-Sun, une joueuse qui a subi de grandes violences sexistes dans les années 2000 : elle a été accusée d’être un homme en raison de son physique et de ses impressionnantes performances. Six équipes rivales avaient en effet menacé de boycotter les championnats de Corée du Sud de football, si elle continuait d’y participer.

publicité

En août 2016, lors de la finale du 800 mètres aux Jeux Olympiques de Rio, l’athlète sud-africaine Caster Semenya franchit victorieuse la ligne d’arrivée, devant la Burundaise Francine Niyonsaba et la Kenyane Margaret Wanbui. Le public n’a alors manifesté que très peu d’émotion : la gêne était palpable. La raison ? L’identité sexuée de ces trois athlètes ne cessait d’interroger, mais plus encore, leur production naturelle de testostérone, soupçonnée d’être trop élevée, par rapport aux autres concurrentes.

Le 19 août 2009, à l’occasion des championnats du monde d’athlétisme à Berlin, Caster Semenya avait déjà accompli un exploit en remportant la finale du 800 mètres. Très vite, cette victoire avait défrayé la chronique. Le rythme imposé par Semenya, qui venait de pulvériser son record personnel, interroge et des doutes sont émis au sujet de son appartenance au sexe féminin. Ces suspicions étaient d’autant plus troublantes que Caster Semenya restait très en deçà, non seulement des temps masculins moyens, mais aussi du record du monde (1 minute 53 secondes 28 centièmes), détenu depuis le 26 juillet 1983 par la Tchèque Jarmila Kratochvilova. La légitimité de sa participation à la compétition a été ainsi remise en cause : elle aurait une masse musculaire trop importante, une poitrine trop plate, un bassin trop étroit, une pilosité trop abondante, une voix trop rauque… et aurait accompli une course exceptionnelle… comme celle du spri


[1] L’hyperandrogénie désigne une production excessive d’hormones androgènes (en particulier la testostérone).

Anaïs Bohuon

Socio-historienne, Professeure des universités à l'UFR STAPS de l'Université Paris-Sud

Mots-clés

Féminisme

Notes

[1] L’hyperandrogénie désigne une production excessive d’hormones androgènes (en particulier la testostérone).