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La démocratie en Égypte – arbre mort ou graine en germe ?

Politiste

L’élan démocratique, né pendant le printemps arabe et qui a abouti à l’arrivée au pouvoir d’Al-Sissi en 2014, s’est essoufflé. Depuis cette date, la « rue égyptienne » est restée à – quelques rares exceptions près – silencieuse. Veillant aux intérêts économiques et sécuritaires de son pays, Al-Sissi n’a qu’une exigence : que les Égyptiens se rassemblent derrière lui et acceptent une restriction de leurs droits politiques ; conduisant ainsi l’Égypte à vivre de nouveau une époque d’autoritarisme populaire.

Dans le paysage politique de l’Égypte d’aujourd’hui, presque rien ne rappelle désormais les tentatives de changements démocratiques entamées dans le pays il y a seulement quelques années. Le président Abdel Fattah Al-Sissi, un officier de l’armée, dirige d’une main de fer. Il effectue déjà un deuxième mandat qui était supposé d’achever en 2022 et, selon la Constitution actuelle, devrait être le dernier. Toutefois, le 16 avril 2019, le Parlement, composé en majorité de partisans du président et de ses services de sécurité, a apporté des amendements constitutionnels qui permettront notamment au président Al-Sissi de prolonger son mandat jusqu’en 2024 et lui permettront de rester en fonction jusqu’en 2030. Les amendements constitutionnels adoptés étendent aussi les pouvoirs présidentiels sur le pouvoir judiciaire et confèrent à l’armée un rôle politique en lui octroyant un pouvoir protecteur de la stabilité de l’État. Ces amendements constitutionnels furent aussi approuvés par référendum en avril 2019.

Depuis son accession au pouvoir présidentiel en 2014, Al-Sissi a promulgué de nombreuses lois visant à contrôler la vie politique et l’espace public en vertu de la légalisation des pratiques autoritaires : de l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi sur les manifestations qui rend presque impossible d’obtenir une autorisation pour un rassemblement pacifique, à l’adoption de nouvelles règles pour les universités d’État restreignant de manière significative les libertés académiques ; de la promulgation de lois draconiennes sur les médias qui font courir à la liberté d’expression un risque juridique éloquent ; à une loi sur les ONG qui soumet les organisations non gouvernementales à la surveillance complète par une autorité composée des services de sécurité[1].

Pourtant, ces pratiques autoritaires ne rencontrent parmi la population égyptienne aucune résistance notable inspirée de la démocratie. Contrairement aux années 2011 à 2013 qui furent marquées par une intensification


[1] Hamzawy, Amr, Egypt after the 2013 military coup: Law-making in service of the new authoritarianism, Philosophy and Social Criticism, 2017, Vol. 43 (4-5), 392-405.

[2] Hamzawy, Amr, „Nur der General weiss, was das ägyptische Volk zu wollen hat“, Neue Züricher Zeitung, 12 décembre 2018, https://www.nzz.ch/meinung/von-der-beharrlichkeit-in-aegypten-den-aufstand-von-2011-umzudeuten-ld.1438512 et https://www.alquds.co.uk/%D8%A7%D9%84%D8%B3%D9%8A%D8%B3%D9%8A-%D8%AB%D9%88%D8%B1%D8%A9-%D9%8A%D9%86%D8%A7%D9%8A%D8%B1-%D8%B9%D9%84%D8%A7%D8%AC-%D8%AE%D8%A7%D8%B7%D8%A6-%D9%84%D8%AA%D8%B4%D8%AE%D9%8A%D8%B5-%D8%AE%D8%A7%D8%B7/

[3] Hamzawy, Amr, „Legislating authoritarianism: Egypt’s new era of repression“, Carnegie Paper 302, mars 2017, https://carnegieendowment.org/files/CP_302_Hamzawy_Authoritarianism_Final_Web.pdf.

[4] Hamzawy, Amr, „Egyptian liberals and their anti-democratic deceptions: A contemporary sad narrative“, in: Fahmy, Dalia & Faruqi, Daanish (eds.), Egypt and the contradictions of liberalism, London: Oneworld Publications, 2017, 337-360.

Amr Hamzawy

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Notes

[1] Hamzawy, Amr, Egypt after the 2013 military coup: Law-making in service of the new authoritarianism, Philosophy and Social Criticism, 2017, Vol. 43 (4-5), 392-405.

[2] Hamzawy, Amr, „Nur der General weiss, was das ägyptische Volk zu wollen hat“, Neue Züricher Zeitung, 12 décembre 2018, https://www.nzz.ch/meinung/von-der-beharrlichkeit-in-aegypten-den-aufstand-von-2011-umzudeuten-ld.1438512 et https://www.alquds.co.uk/%D8%A7%D9%84%D8%B3%D9%8A%D8%B3%D9%8A-%D8%AB%D9%88%D8%B1%D8%A9-%D9%8A%D9%86%D8%A7%D9%8A%D8%B1-%D8%B9%D9%84%D8%A7%D8%AC-%D8%AE%D8%A7%D8%B7%D8%A6-%D9%84%D8%AA%D8%B4%D8%AE%D9%8A%D8%B5-%D8%AE%D8%A7%D8%B7/

[3] Hamzawy, Amr, „Legislating authoritarianism: Egypt’s new era of repression“, Carnegie Paper 302, mars 2017, https://carnegieendowment.org/files/CP_302_Hamzawy_Authoritarianism_Final_Web.pdf.

[4] Hamzawy, Amr, „Egyptian liberals and their anti-democratic deceptions: A contemporary sad narrative“, in: Fahmy, Dalia & Faruqi, Daanish (eds.), Egypt and the contradictions of liberalism, London: Oneworld Publications, 2017, 337-360.