Littérature

Une sphère publique alternative : les festivals internationaux de littérature

Sociologue

Véritables instances de légitimation et de professionnalisation pour les auteurs, l’attraction des festivals de littérature à considérablement crû en ce début de XXIe siècle. Si la logique économique prévaut dans les salons et foires, les festivals de littérature privilégient quant à eux une fonction culturelle, à travers la programmation, le temps accordé à la discussion et à la lecture en public, dans une atmosphère de plus en plus politisée.

À l’heure où le festival international de littérature de Berlin s’achève, on peut s’interroger sur l’expansion de ce type d’événements dans le monde au XIXe siècle. L’essor des festivals de littérature tient à la convergence de plusieurs facteurs : les nouvelles formes de promotion développées par l’industrie du livre afin d’atteindre le public (salons, foires, festivals), les politiques en faveur de la démocratisation culturelle, et l’engagement d’un groupe d’intermédiaires. Ils remplissent une triple fonction, culturelle, économique et politique.

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Cependant, alors que la fonction économique prévaut dans les salons et foires, les festivals de littérature privilégient quant à eux la fonction culturelle, à travers la programmation, le temps accordé à la discussion et à la lecture en public, le cadre convivial, la dimension festive. À quoi s’ajoute une fonction rituelle qui conforte l’illusio, à savoir la croyance dans la valeur de la littérature, renforcée par la présence charismatique de l’écrivain.e en personne.

Pour les auteurs, ces festivals ont également, une fonction de légitimation et de professionnalisation. Ils leur offrent aussi des espaces de sociabilité nationale ou transnationale, tissant des réseaux par-delà les frontières géographiques et linguistiques. Enfin, certains festivals remplissent une fonction politique en créant une sphère publique transnationale alternative.

L’essor des festivals de littérature

Premier festival de littérature en Europe, Cheltenham, fondé en 1949, demeura longtemps le seul de son espèce. En France, c’est aux marges de l’institution littéraire que naît le phénomène, pour des genres en quête de légitimité, la BD (Angoulême, 1974) et le polar (Reims 1986), qui revendiquent la dimension festive contre la sacralisation de la « haute culture ». Dans le monde anglophone, il s’installe revanche au cœur de la vie littéraire dès cette époque : en 1974 est mis en place le festival Authors at Harbourfront Centre à Toronto, en


Gisèle Sapiro

Sociologue, Directrice de recherche au CNRS et directrice d'études à l'EHESS