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Boris Johnson, l’an I du trumpisme européen

Politiste

Boris Johnson n’a pas tant jeudi gagné une élection qu’exploité un contexte politique exceptionnel (l’interminable débat sur le Brexit), ainsi que la faiblesse de son opposant direct, Jeremy Corbyn. Cette élection fut en effet la bataille de deux dirigeants impopulaires, et Johnson s’est avéré le moins inéligible des deux. Explication de vote.

Les conservateurs emmenés par Boris Johnson ont remporté l’élection législative britannique en empochant une majorité de 80 sièges (365 sièges). Il s’agit de la plus importante majorité conservatrice depuis 1987, à l’apogée du thatchérisme.

Le parti travailliste dirigé par Jeremy Corbyn a connu son plus grand revers électoral depuis 1935. Son nombre de sièges (203) est inférieur à celui obtenu par le leader travailliste Michael Foot en 1983 (209). La comparaison est intéressante car, à cette époque, le Labour avait adopté une orientation nettement à gauche, comme celle de Corbyn aujourd’hui.

Boris Johnson n’a pas tant gagné une élection qu’exploité un contexte politique exceptionnel (l’interminable débat sur le Brexit), ainsi que la faiblesse de son opposant direct, Jeremy Corbyn. Cette élection fut en effet la bataille de deux dirigeants impopulaires, et Johnson s’est avéré le moins inéligible des deux.

Après neuf années de politiques d’austérité, le premier ministre sortant a soigneusement évité de traiter des questions sociales et économiques pendant la campagne. Il savait qu’elles le mettraient dans une situation inconfortable. Il est allé jusqu’à promettre de modestes et vagues investissements dans la santé publique (insuffisants, selon les experts, car ils ne permettraient même pas de rattraper le niveau de dépenses publiques pré-2010).

Le National Health Service (NHS), la santé publique qui est largement socialisé, est un acte de foi chez les Britanniques. La gratuité des soins financés par un impôt progressif est en effet un conquis social majeur. Remettre ce principe en jeu serait suicidaire pour tout parti de gouvernement.

Johnson a pu aussi compter sur la mansuétude de médias qui ont épargné le premier ministre. La BBC, notamment, a été critiquée pour avoir failli à sa mission d’information de manière impartiale. Lorsque Jeremy Corbyn confia aux médias, document en main, que des négociations secrètes étaient en cours entre le gouvernement britannique et


Philippe Marlière

Politiste, Professeur de science politique à University College London