Droit

Faurisson devant la justice en 1962 ou le cas singulier d’une offense au président de la République non poursuivie

Professeur de droit public à l'Université Paris II (Panthéon-Assas)

Un peu plus d’un an après sa mort, la biographie de Robert Faurisson continue de s’éclairer, et d’entamer l’image apolitique que le négationniste a tenté de se construire. Bien au contraire, son ancrage dans la mouvance d’extrême droite française pendant la guerre d’Algérie apparait nettement à la faveur d’un démêlé judiciaire peu connu, une accusation d’outrage au président de la République qui révèle aussi sa quête effrénée de la gloire médiatique.

Qui était vraiment Robert Faurisson, « ce faussaire de l’histoire » qui a passé une partie de sa vie à vouloir démontrer l’inexistence des chambres à gaz ? Les nécrologies qui sont parues au moment de son décès en 2018 ont rappelé des faits précis, notamment empruntés à l’excellente biographie de Valérie Igounet.

Celle-ci a notamment réussi à réduire à néant la thèse de son prétendu apolitisme qu’il a toujours soutenue, en démontrant son ancrage politique dans la mouvance d’extrême droite française pendant la guerre d’Algérie. À l’occasion de nos recherches qui ont débouché sur une histoire du délit d’offense au président de la président de la République, nous avons découvert un épisode judiciaire concernant le « jeune Faurisson » qui éclaire davantage sa personnalité, peu reluisante. Il n’est pas inutile de compléter sur ce point précis du procès qui lui a été intenté, les informations très précieuses fournies par sa biographe.

Rappelons que, avant d’accéder à la notoriété – qu’il recherchait – par ses propos négationnistes, le « jeune » Faurisson avait déjà fait un peu parler de lui au cours de l’année 1962. Il avait proposé d’interpréter le poème de Rimbaud, « Voyelles » en suggérant que chacune des voyelles était censée symboliser une part du corps féminin considérée in coïtu.

Il est vigoureusement critiqué par René Étiemble, grand spécialiste d’Arthur Rimbaud et professeur à la Sorbonne, dans une tribune du Monde. Celui-ci lamine l’interprétation « faurissonienne » qu’il n’est pas loin de juger délirante, traitant son interprétation de « paranoïa pansexiste », et son auteur de « polisson », relevant, enfin, que « la rigueur dont il se pique … [est] celle même des interprétations paranoïaques-critiques si chères à Salvador Dali. ». Faurisson demande et obtient un droit de réponse que le journal publie le 10 février dans lequel il défend cette ligne d’interprétation érotique.

Les faits que nous allons ici narrer concernent un second épisode, judiciaire cette foi


[1] Tous ces détails sont tirés de la biographie précitée de Valérie Igounet, Robert Faurisson ; portrait d’un négationniste, Denoël, 2012, p. 84.

[2] Ces expressions figurent dans le jugement du tribunal correctionnel de Cusset (Allier) ministère public. c. Faurisson du 11 mai 1962, AD Allier, 1717 W19 (que les Archives départementales de l’Allier nous ont très aimablement communiqué). Une partie de ces expressions, mais pas toutes, figurent dans l’ouvrage précité de Valérie Igounet, op. cit., p. 84.

[3] Cité par V. Igounet, op. cit. p. 85.

Olivier Beaud

Professeur de droit public à l'Université Paris II (Panthéon-Assas), Membre senior de l'IUF

Notes

[1] Tous ces détails sont tirés de la biographie précitée de Valérie Igounet, Robert Faurisson ; portrait d’un négationniste, Denoël, 2012, p. 84.

[2] Ces expressions figurent dans le jugement du tribunal correctionnel de Cusset (Allier) ministère public. c. Faurisson du 11 mai 1962, AD Allier, 1717 W19 (que les Archives départementales de l’Allier nous ont très aimablement communiqué). Une partie de ces expressions, mais pas toutes, figurent dans l’ouvrage précité de Valérie Igounet, op. cit., p. 84.

[3] Cité par V. Igounet, op. cit. p. 85.