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Le Brésil de toutes les crises : Bolsonaro et le Covid-19

Economiste

Au Brésil de Bolsonaro, la crise sanitaire provoquée par le Covid-19 vient dans sa brutalité et sa dimension tragique s’ajouter à une crise économique d’une grande gravité, à une crise sociale également poignante et à une crise politique qui met en danger la démocratie. Les citoyens sont à nouveau face à des choix décisifs pour l’avenir de leur nation.

Lors d’un de ses entretiens informels, le 26 mars dernier, avec des journalistes au sujet de la pandémie du coronavirus, Jair Bolsonaro a déclaré : « Il faudra analyser pourquoi les Brésiliens sont capables de marcher dans les égouts sans que rien ne leur arrive. » La phrase du président brésilien traduit remarquablement l’un de ses traits majeurs : la bêtise.

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De surcroît, elle trahit son immense mépris à l’égard d’une grande partie de la population, abandonnée depuis des lustres dans des quartiers mal desservis en eau potable et en système d’assainissement. Selon l’Institut Brésilien de Géographie et Statistique – l’équivalent de l’INSEE – 35,7% des Brésiliens (soit plus de 70 millions) ne bénéficient pas d’une infrastructure sanitaire adéquate. Cette carence entraîne près de 350 000 hospitalisations par an, selon le même IBGE, en raison des maladies les plus fréquentes comme le choléra, la diarrhée, l’hépatite A et la leptospirose.

C’est dire l’ampleur de la crise sociale qu’aucun gouvernement démocratiquement élu depuis la fin du régime militaire en 1985 n’a jamais réellement prise en compte. L’accès à la consommation de masse des plus démunis, financé grandement par le crédit, a dominé les politiques de développement économique du Brésil du XXIe siècle. Le raisonnement du président est donc évident : si les Brésiliens survivent à la misère et à ses corollaires sanitaires, pourquoi ne survivraient-ils pas à une pandémie?

Pandémie, du reste, qui n’en est pas une aux yeux du président. Depuis des semaines, Jair Bolsonaro dénonce l’hystérie collective autour de cette soi-disant épidémie. « Un petit rhume » sans gravité, répète-t-il incessamment, accusant publiquement la presse d’être la responsable de cette inflation médiatique. Dans sa croisade démentielle, il compte sur le soutien des phalanges bolsonaristes qui viennent à sa rescousse sur les réseaux sociaux, diffusant des vidéos où, à la Trump, on blâme la Chine, mais aussi l’Europe post-chrétienne. L


[1] Fernando Haddad pour le Parti des Travailleurs (PT); Ciro Gomes, pour Le Parti Démocratique du Travail (PDT); Guilherme Boulos, pour le Parti Socialisme et Liberté (PSOL);  Flávio Dino pour le Parti Communiste du Brésil (PCdoB)

Lena Lavinas

Economiste, Professeure à l'Institut d’Economie de l’Université Fédérale de Rio de Janeiro, membre de l’Ecole de Science Sociale de l’IAS de Princeton

Mots-clés

Covid-19

Notes

[1] Fernando Haddad pour le Parti des Travailleurs (PT); Ciro Gomes, pour Le Parti Démocratique du Travail (PDT); Guilherme Boulos, pour le Parti Socialisme et Liberté (PSOL);  Flávio Dino pour le Parti Communiste du Brésil (PCdoB)