Le miracle et le monstre – un regard sociologique sur le Coronavirus
Ce que nous vivons en ce moment n’est rien de moins qu’un véritable miracle sociologique. Quelque chose d’incroyable est en train de se produire. Le monde ralentit. On a l’impression que des freins gigantesques ont été serrés sur les roues perpétuelles de la production, du mouvement et de l’accélération. Depuis plus de 200 ans, depuis le début du XIXe siècle, le globe connaît un processus de dynamisation (inégal et souvent violent) : nous avons littéralement mis le monde en mouvement à un rythme toujours plus rapide.

Il suffit de regarder les chiffres : depuis 1800, la production et la consommation économiques, l’utilisation et l’épuisement des ressources, l’utilisation de l’énergie, la masse totale et le nombre de personnes en mouvement augmentent tous de manière incessante et exponentielle. Lorsque vous regardez l’ensemble des mouvements de personnes et de biens et matériaux circulant sur la planète, vous obtenez une courbe de croissance impressionnante qui ne connaît pratiquement aucune rupture, pause ou limite significative. Certes, les récessions économiques et les guerres ont parfois, pendant de courtes périodes, réduit la vitesse de production et de mouvement mais, invariablement, elles ont aussi produit de nouvelles formes et opportunités de croissance et d’accélération. Comme nous le savons grâce à Paul Virilio, les guerres ont toujours été des causes importantes d’accélération et de mobilisation.
Et maintenant ? Le monde s’arrête. Non pas du fait d’une crise économique. Ni d’une guerre. Ou d’une catastrophe naturelle : c’est nous, les humains, qui, par décision politique et après délibération, avons freiné ! Le virus n’est évidemment pas en train de corroder nos avions. Il ne détruit pas nos usines. Il ne nous force pas à rester chez nous. C’est notre délibération politique et notre action collective qui le fait. C’est nous qui le faisons !
Nous pouvons le faire ! Nous l’avons fait !
Pourquoi est-ce si remarquable ? Parce que plus de cinquante ans d’inqui