Société

Les makers contre le coronavirus : quelles leçons pour demain ?

Sociologue, Sociologue, Sociologue

Les stocks de masques faisant défaut au plus fort de la crise sanitaire, de nombreux makers ont proposé d’en produire et de fournir directement les soignants. Longtemps peu pris au sérieux, ces bricoleurs 3.0 ont ainsi fait la preuve d’une capacité productive nationale, même si l’ordre réglementaire vertical de l’État et de l’industrie s’accommode mal de leur mode d’organisation horizontal. À l’heure du bilan, la libre circulation des savoirs et la coopération prônée par les makers pourraient aider à transformer en profondeur le travail.

La longue parenthèse du (premier) confinement maintenant refermée, l’heure des premiers bilans vient de sonner. À côté du personnel soignant et de toutes celles et ceux qui, par leurs activités de toutes natures, ont contribué au maintien de notre vie quotidienne, les makers se sont tôt impliqués dans la lutte contre le coronavirus.

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Technicienn·e·s chevronné·e·s ou non, des milliers de personnes se sont organisées dès la mi-mars pour, dans des makerspaces ou tout autre atelier improvisé, fabriquer du matériel de protection (blouses, masques, visières) ou médical (valves, pousses seringues et, fin avril, des respirateurs en open source) alors que les chaînes d’approvisionnement globales et les stocks d’État se révélaient déficients.

À l’heure du déconfinement, tandis que les chiffres de la mobilisation et les retours de terrain sont plutôt flatteurs, les makers oscillent pourtant entre fierté, désaccords voire désillusion pour certains d’entre eux. Parce qu’il révèle tout à la fois le dynamisme et l’hétérogénéité d’un monde qui s’est imposé récemment aux marges du système productif, l’épisode que nous venons de vivre à l’occasion de la crise du Covid-19 est instructif. Plus que la célérité dont ils ont fait preuve face à la pandémie, ce sont les principes de production et le cadre d’organisation que les makers ont expérimentés qui méritent notre attention.

Dans l’épreuve, les modèles productifs éphémères, multi-acteurs, de fabrication locale et distribuée qu’ils ont élaborés n’ont pas fait que démontrer leur efficience en temps de pénurie. Ils interrogent également nos cadres de pensée et les formes institutionnelles actuelles qui encadrent le travail, l’entreprise et la production. Dessinent-ils une alternative crédible pour imaginer et construire le monde de demain, au-delà de la dichotomie actuelle qui oppose globalisation et relocalisation ? Pour répondre à une telle question, il faut voir plus loin et détecter la pluralité des initiatives avec plus de


Isabelle Berrebi-Hoffmann

Sociologue, Chercheure au CNRS

Marie-Christine Bureau

Sociologue, Chercheure au CNRS

Michel Lallement

Sociologue, Professeur du Cnam, titulaire de la chaire d'analyse sociologique du travail

Mots-clés

Covid-19