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Des aléas du politique à l’approche des élections américaines

Philosophe

Au début de l’année 2020, l’économie américaine était florissante, le taux de chômage était historiquement bas, la bourse était au plus haut, et Donald Trump semblait avoir toutes ses chances pour triompher d’un candidat démocrate radical lors de la prochaine élection présidentielle. Depuis, le choix de Joe Biden, la crise économique et sanitaire et le mouvement « Black Lives Matter » ont bouleversé les pronostics, rendant l’issue pour le moins incertaine. Retour sur une campagne qui se déroule dans un contexte de crise inédit, dans un pays divisé entre socialistes, démocrates, républicains.

Au début du mois de mars 2020, on pouvait imaginer que le candidat démocrate serait le « socialiste indépendant » Bernie Sanders. La douzaine de prétendants qui s’affrontait dans les pré-primaires depuis 2019 offrait un beau bouquet de biographies et de programmes : trois femmes, trois Noir(e)s, un Asiatique, un jeune homosexuel maire d’une ville moyenne, plusieurs gouverneurs d’États du middle-ouest peu connus mais expérimentés ; ils furent rejoints sur le tard par l’ancien vice-président de Barack Obama, Joe Biden.

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À la suite des premières élections et caucus traditionnels du mois de février dans les petits États d’Iowa, suivis de New Hampshire puis de Nevada, il semblait que le parti démocrate s’était gauchisé depuis la défaite en 2016 ; au début mars, les deux centristes encore dans la course, la sénatrice (Amy Klobacher) et le maire homosexuel (Pete Buttigieg) faisaient face Bernie Sanders et Elisabeth Warren. Joe Biden était encore sur les listes mais il n’était pas pris au sérieux ; n’avait-il pas cédé sa place déjà en 2016 à Hillary Clinton, une centriste favorite de l’establishment ? Aux yeux des commentateurs, la domination de la gauche serait confirmée et pliée par la primaire de la Californie le 29 février.

Or, malgré l’importance quantitative de la Californie, il fallait prendre en compte une autre primaire qui aurait lieu le même jour, celle de la Caroline du Sud où le vote afro-américain incarnait pour ainsi dire un poids qualitatif qui se ferait sentir au-delà des frontières de cet État de taille moyenne. L’avenir du candidat Biden y était en jeu. Son pari allait être récompensé au-delà même de ses espérances lorsqu’au lendemain de sa victoire, les deux opposants centristes lui apportait leur soutien suivis bientôt par le dernier espoir du centre-gauche, Elisabeth Warren.[1] Fort de ces ralliements inattendus, Joe Biden semblait remplir toutes les cases requises pour un candidat du parti démocrate renouvelé : il était soutenu par l’aile ga


[1] L’élection du 29 février mettait fin au challenge de Michael Blumberg, l’ancien maire de New York et milliardaire dont l’argent devait mettre fin au gauchissement du parti.

[2] Lors des primaires de 2016, Bernie n’apportait son soutien à Hillary Clinton qu’au moment de la Convention du parti en août ; et la mauvaise grâce évidente avec laquelle le « socialiste » soutenait la candidate adoubée du parti démocrate pendant la campagne de l’automne détournait plus d’un de ses supporteurs de donner son bulletin à Mme. Clinton.

[3] Ce que la gauche dénonce comme des compromis chez les « New Democrats » de Bill Clinton mettait fin à un quart de siècle de domination républicaine à partir de l’échec des ambitions de la Great Society en 1968. Est-ce que ce sont les ambitions réduites qui portèrent les démocrates au pouvoir en 1992 étaient la cause ou le résultat d’un abandon supposé d’une politique de classe ? Ou est-ce que celle-ci était fondée sur une théorie historiquement dépassée ?

[4] C’était l’erreur de Hillary Clinton en 2016 qui négligeait les États de Wisconsin et Michigan, considérés pré-acquis par les démocrates et qui finirent par donner des minces majorités, et donc la présidence, à Donald Trump.

[5] Voici le nombre de meurtres par la police selon le New York Times entre 2013 et 2019: 1111; 2014, 1059; 2015, 1103; 2016, 1071; 2017, 1099; 2018, 1143; 2019, 1099. À en regarder la constance à partir de la date du meurtre de Michael Brown, on comprend que la mémoire des morts arbitraires se soit rallumée !

[6] Rappelons qu’après la vague d’immigration d’avant la guerre de 1914, venue de l’Europe de l’Est et du Sud, le Congrès votait une loi en 1924 qui fermait la porte aux immigrés. Ce n’est qu’après 1964, dans la foulée du Mouvement des droits civiques qu’elle fut ouverte à nouveau. Donald Trump fait de son mieux pour la refermer.

[7] Pour mémoire, il s’agissait de la première grande manifestation du Pouvoir Blanc pendant l’été 2017. Donald Trump refusa de conda

Dick Howard

Philosophe, distinguished professeur émérite de l’université d’État de New York

Notes

[1] L’élection du 29 février mettait fin au challenge de Michael Blumberg, l’ancien maire de New York et milliardaire dont l’argent devait mettre fin au gauchissement du parti.

[2] Lors des primaires de 2016, Bernie n’apportait son soutien à Hillary Clinton qu’au moment de la Convention du parti en août ; et la mauvaise grâce évidente avec laquelle le « socialiste » soutenait la candidate adoubée du parti démocrate pendant la campagne de l’automne détournait plus d’un de ses supporteurs de donner son bulletin à Mme. Clinton.

[3] Ce que la gauche dénonce comme des compromis chez les « New Democrats » de Bill Clinton mettait fin à un quart de siècle de domination républicaine à partir de l’échec des ambitions de la Great Society en 1968. Est-ce que ce sont les ambitions réduites qui portèrent les démocrates au pouvoir en 1992 étaient la cause ou le résultat d’un abandon supposé d’une politique de classe ? Ou est-ce que celle-ci était fondée sur une théorie historiquement dépassée ?

[4] C’était l’erreur de Hillary Clinton en 2016 qui négligeait les États de Wisconsin et Michigan, considérés pré-acquis par les démocrates et qui finirent par donner des minces majorités, et donc la présidence, à Donald Trump.

[5] Voici le nombre de meurtres par la police selon le New York Times entre 2013 et 2019: 1111; 2014, 1059; 2015, 1103; 2016, 1071; 2017, 1099; 2018, 1143; 2019, 1099. À en regarder la constance à partir de la date du meurtre de Michael Brown, on comprend que la mémoire des morts arbitraires se soit rallumée !

[6] Rappelons qu’après la vague d’immigration d’avant la guerre de 1914, venue de l’Europe de l’Est et du Sud, le Congrès votait une loi en 1924 qui fermait la porte aux immigrés. Ce n’est qu’après 1964, dans la foulée du Mouvement des droits civiques qu’elle fut ouverte à nouveau. Donald Trump fait de son mieux pour la refermer.

[7] Pour mémoire, il s’agissait de la première grande manifestation du Pouvoir Blanc pendant l’été 2017. Donald Trump refusa de conda