Les généraux et la Constitution : autopsie du coup d’État en Birmanie
Le 1er février 2021, un nouveau coup d’État était orchestré au Myanmar (ex-Birmanie) par les hauts-militaires du régime. Alors que cet État semblait s’être engagé depuis 2012 dans une transition politique d’un régime militaire autoritaire vers un régime civil plus ouvert, l’organisation d’élections libres en novembre 2015, la victoire de la Ligue nationale pour la démocratie (NLD – National League for Democracy) emmenée par Aung San Su Kii puis le laborieux processus du dialogue politique national (21st Century Panglong Union Peace Conference) engagé à la suite du processus de paix avait pu laisser croire à l’étranger que le Myanmar était en train de tourner une page de son histoire.
Il ne s’agit pas ici d’examiner les ressorts politiques de cette crise ni de la reprise en mains du pouvoir par les militaires mais d’analyser le rôle joué par le cadre constitutionnel dans cette transition. Pris à leur propre piège, l’armée (Tatmadaw) n’a eu d’autre issue que de tordre le cou à une constitution qu’elle avait elle-même fait adopter dans des conditions tumultueuses, démontrant malheureusement une nouvelle fois que la force prime encore sur le droit.
Une constitution autoritaire parée d’atours démocratiques
La constitution actuelle du Myanmar a été adoptée en 2008 par référendum : elle est l’œuvre du pouvoir militaire et constitue un véritable laboratoire d’étude pour qui veut comprendre comment un texte constitutionnel peut affirmer tout et son contraire. Le texte est long (457 articles), traite à peu près de tous les sujets, ne correspond à aucune des catégories traditionnelles du droit constitutionnel, comprend des verrous destinés à empêcher son utilisation par d’autres que ses promoteurs et intègre nombre de discriminations à l’égard de certains groupes (notamment les différences entre nationalité et citoyenneté destinées à créer des sous-groupes de population possédant moins de droits, notamment politiques).
Ceci a donné lieu à un sentiment de frustration