Chasseurs de prédateurs : justiciers autoproclamés et lutte anti-pédophiles
Le script est aussi sommaire que routinier : après avoir endossé l’identité d’un mineur fictif sur internet, puis appâté un prédateur présumé, le justicier confond sa proie et la livre à la police. Désormais bien rodé, ce scénario fournit un cadre rudimentaire pour les dizaines de « chasses aux pédophiles » recensées dans la presse française ces dernières années, toutes régions confondues.
Mais en ce soir de septembre 2020 à Besançon, les événements prennent une autre tournure : après avoir repéré sur un site de rencontre un homme qui manifestait de l’intérêt pour une jeune fille de leur connaissance, les deux justiciers en herbe manigancent leur coup. Ils lui font miroiter un rendez-vous puis, après s’être rendus sur les lieux à la place de l’adolescente, se déchaînent sur leur proie et lui dérobent son téléphone portable. Déjà condamné dans le passé pour des faits de violence, notamment homophobe, le plus virulent des deux compères écope de douze mois de prison ferme, tandis que son acolyte est placé huit mois sous surveillance électronique à domicile.

Ce fait divers est emblématique d’une pratique controversée mais suscitant un engouement croissant, à travers laquelle des amateurs du maintien de l’ordre s’improvisent détectives, agents interpellateurs, voire juges et bourreaux, au nom de la protection de l’enfance. Qu’ils agissent en solitaire ou en équipe, les chasseurs de pédophiles partagent la même défiance à l’égard du système judiciaire, ainsi qu’un goût prononcé pour l’enquête en ligne. Et aucun d’entre eux n’échappe à la controverse quant à la légalité et l’efficacité de leurs méthodes.
Celles-ci varient pourtant sensiblement d’un cas à l’autre : si les plus légalistes se contentent de transmettre à la police des éléments à charge contre les pédophiles présumés – notamment les propos explicites échangés sur les réseaux sociaux –, d’autres n’hésitent pas à prendre à partie leurs cibles sur le lieu du rendez-vous.
En février 2020 à Mont-de-Marsan,