Taxer le trading haute fréquence : il y a urgence
Le 31 août 2020, le sénateur démocrate du New Jersey Phil Murphy déclarait au cours d’une conférence de presse envisager « très sérieusement » la création d’une taxe sur le trading haute fréquence. Les réactions ne se firent pas attendre : début septembre, un groupe composé de marchés (New York Stock Exchange, Nasdaq Inc.) et de teneurs de marché [1] (Citadel Securities, Virtu Financial Inc.) affirmait être prêt à déménager ses infrastructures dans un autre État, si la proposition venait à se matérialiser. Apportant du crédit à la menace, une note envoyée par le New York Stock Exchange à ses clients, les informant que l’institution ferait fonctionner fin septembre ses serveurs depuis un site de secours situé à Chicago, pour une durée d’une semaine.

L’idée d’une taxe sur les transactions financières n’est pas nouvelle, tant s’en faut [2] : il n’en reste pas moins qu’elle continue d’apparaître iconoclaste, néfaste et injustifiée à la très grande majorité des participants de marché – et tout autant à une partie des mondes politique et académique. Basse obstinée de la rhétorique financière, le refus d’une taxation des transactions déploie toujours les mêmes arguments : micro-taxe invisible mais douloureuse et inefficace, diminution de la qualité de marché (in fine nuisible aux épargnants), risque de fuite des capitaux et défection des investisseurs, augmentation locale du chômage etc. S’agissant d’activités de marché particulièrement spéculatives, cette liste non exhaustive d’arguments prête à sourire.
De fait, les intervenants financiers sont depuis fort longtemps passés maîtres dans l’art délicat du lobbying : l’incapacité réelle à obtenir la mise en place d’une telle taxe au niveau européen en constitue la trace la plus manifeste, en dépit des efforts répétés de certain·e·s député·e·s et d’ONG comme Finance Watch ou Oxfam. Et quand bien même un tel impôt existerait dans la loi – en France, une taxe sur les transactions financières a été mise en place en 201