France-Algérie : la justice transitionnelle, une voie vers la réconciliation des mémoires ?
En février dernier, l’historien et spécialiste de l’Algérie Benjamin Stora a remis au Président de la République son rapport sur « les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie ». À un an du soixantième anniversaire de la signature des accords d’Évian et de la prochaine élection présidentielle, la date n’a pas été choisie au hasard. Le texte d’un peu plus de cent cinquante pages appelle de ses vœux une « réconciliation des mémoires ». Il recommande plusieurs mesures, dont la création d’une commission « Mémoire et vérité ». Cette commission, si elle voit le jour, sera l’une des toutes premières expériences de justice transitionnelle en France.

La justice transitionnelle est une branche du droit encore trop peu enseignée en France, où elle ne semble pas susciter de réel engouement. Elle est souvent assimilée – et à tort – à l’amnistie et aux autres mécanismes d’exonération de la responsabilité pénale[1]. Mais le spectre de la justice transitionnelle est beaucoup plus large. Il couvre l’ensemble des mécanismes judiciaires et non judiciaires « chargés de traiter les exactions d’un régime qui s’est traduit par un degré élevé de violence sociale et de violations systématiques et à grande échelle des droits fondamentaux de la personne[2] ».
Dans un cas, on poursuit et on punit les responsables. Dans l’autre, on repense les mécanismes d’établissement de la responsabilité, on cherche à rendre justice différemment au nom de la réconciliation.
La justice transitionnelle propose donc un vaste éventail de solutions, allant de la justice pénale ordinaire avec, par exemple, la création de tribunaux pénaux internationaux (Rwanda, ex-Yougoslavie) ou « internationalisés » (Sierra Leone, Timor-Leste, Liban) à la création d’organes non-juridictionnels – qui n’ont donc pas compétence pour se prononcer sur l’innocence ou la culpabilité des personnes – tels que des commissions « vérité et réconciliation » (Chili, Afrique du Sud). Dans un cas, on po