Les rescapés de Bisesero : résister, échapper, survivre au génocide des Tutsi
En novembre 2021, la ville de Paris a décidé de baptiser une place du 18e arrondissement du nom d’un des héros rwandais de la résistance au génocide, Aminadabu Birara. Après avoir survécu aux massacres de 1959, 1963 et 1973, celui-ci prend en 1994 la tête de la résistance menée par des civils rwandais dans la région de Bisesero. Pour un historien qui travaille sur la relation franco-rwandaise, cette décision n’est pas neutre. Dans un État, la France, où le déni a longtemps servi de socle à la parole officielle, une telle décision revêt une valeur symbolique et affective particulière pour celles et ceux qui militent depuis 1994, en France et au Rwanda, pour que le génocide des Tutsi soit pleinement reconnu.

Cet événement offre l’occasion de revenir, en historien, sur la résistance organisée à Bisesero et sur le rôle spécifique joué par Aminadabu Birara. Les modalités de cette résistance, de même que la nature des massacres commis dans ces collines, sont désormais bien documentées. Témoignages, archives publiques françaises et rwandaises, archives du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) – procès Kayishema et Ruzindana par exemple, documents de presse, de radio et de télévision, permettent de comprendre comment Bisesero est à la fois un lieu de résistance et un des principaux lieux de massacres du génocide. Se retourner sur Bisesero, c’est donc aussi réinterroger les conditions de possibilité et d’exécution du génocide.
Ce lieu est enfin un des symboles des tensions mémorielles qui persistent autour du rôle joué par la France avant, pendant et à l’issue du génocide. C’est par cette dimension que l’auteur de ces lignes a rencontré Bisesero lors de recherches universitaires qui portaient sur la médiatisation du génocide des Tutsi. Quelques journalistes ont en effet joué un rôle crucial dans la découverte des rescapés les 26 et 27 juin, puis dans l’intervention française du 30 juin 1994. Cette contribution proposera donc, dans sa dernière scansion,