Politique

Entre vitesse et précipitation : la Nouvelle-Calédonie au terme des accords

Magistrat honoraire, Historienne

Après deux annulations de visites ministérielles, Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des Outre-mer, devrait arriver ce week-end en Nouvelle-Calédonie pour entamer une série de rencontres politiques. Suite à la consultation référendaire de décembre 2021 marquée par l’abstention record des indépendantistes, sa mission principale sera de renouer le dialogue en vue de préparer l’avenir institutionnel de l’archipel. Alors que l’exécutif fait de la présence française en Nouvelle-Calédonie un appui essentiel à sa stratégie indopacifique, les indépendantistes réaffirment leur volonté de décoloniser le pays et multiplient les initiatives en ce sens.

Dans une interview donnée lors d’une journée d’études organisée par le journal Le Point et consacrée aux Outre-mer français, le 25 janvier 2022, Sébastien Lecornu tenait des propos révélateurs d’une certaine conception de la place occupée par les « peuples premiers » dans la nation française.  « Les peuples premiers », nous disait-il, « ce n’est pas que le Quai Branly » en faisant allusion au célèbre Musée parisien. « Ce sont aussi deux peuples vivants, les Kanak en Nouvelle-Calédonie et les Amérindiens en Guyane. Ça c’est très concret, c’est humain. Ce n’est pas qu’anthropologique. Nous avons des citoyens de la République française qui sont Kanak et Amérindiens, c’est une richesse nationale qu’il faut préserver. Elle participe à notre identité de Français. »

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Difficile d’imaginer que de tels propos ne suscitent pas un malaise certain parmi les auditeurs amérindiens ou kanak et plus encore parmi les interlocuteurs indépendantistes en Nouvelle-Calédonie ou en Polynésie soucieux d’établir une nouvelle relation équilibrée avec la France fondée sur un partenariat équitable entre États souverains.

À la question du journaliste « Pourquoi la France reste en Nouvelle-Calédonie », Sébastien Lecornu répondait par une autre question : « Pourquoi la France reste en Bretagne ? » Et il poursuivait : « Le démembrement géographique ne peut en aucun cas justifier un éloignement de ce qu’est la nation. […] Pourquoi on reste en Seine Saint Denis ? Pourquoi on reste en Corrèze ? Pourquoi on reste dans la Creuse ? Merci de poser la question parce que l’ensemble même de notre histoire politique, c’est l’État-Nation. L’ensemble du trouble de notre relation avec les territoires d’outre-mer, c’est la colonisation. L’ensemble de la suite de l’histoire, ça s’appelle la République. »

Désapprouvant « une approche comptable de la République » qui consisterait à mesurer la contribution de chaque région ou territoire à la richesse nationale, il déclarait : « Il n’y a que l’Île-de-France q


[1] Site du ministère des Affaires étrangères. Souligné dans le texte.

[2] « Lettre du Président de la République aux Outre-mer », citée par Les Nouvelles Calédoniennes, 31 mars 2022.

[3] Discours d’Emmanuel Macron au théâtre de Nouville, 5 mai 2018. Disponible en ligne.

[4] « Malgré les demandes des partis indépendantistes de reporter la date du scrutin pour des motifs tirés du contexte sanitaire et du deuil coutumier kanak alors proclamé, le scrutin a été maintenu et a vu le « non » l’emporter avec 96,5 % des suffrages exprimés. Toutefois, cette victoire du « non » s’est accompagnée d’un effondrement de la participation […]. » Citation extraite de : « Les outre-mer aux avant-postes 2022 », journée d’étude organisée par le journal Le Point, 25 janvier 2022.

[5] Sénat, session extraordinaire de 2021-2022, n° 831, Rapport d’information fait au nom de la Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, 27 juillet 2022.

[6] Ibid., p. 20.

[7] France info, 16 juillet 2022.

[8] Article 32 de la « Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones » du 13 septembre 2007.

[9] Ce comité spécial communément appelé « Comité de la décolonisation » ou « Comité spécial des 24 » est un organe subsidiaire de l’Assemblée générale de l’ONU, créé en 1961, sur le fondement de la résolution 1654 (XVI) en date du 27 novembre 1961.

[10] Nic Maclellan in Islands Business, 11 juillet 2022. Extrait du rapport remis aux membres du Forum : « The result of the referendum is an inaccurate representation of the will of registered voters and instead can be interpreted as a representation of a deep-seated ethnic division in New Caledonia, which the Committee fears has been exacerbated by the State’s refusal to postpone the referendum. »

[11] Ce « groupe de contact » dont on note le caractère informel, est présidé par Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemb

Christian Belhôte

Magistrat honoraire

Isabelle Merle

Historienne, Directrice de recherche au CNRS

Notes

[1] Site du ministère des Affaires étrangères. Souligné dans le texte.

[2] « Lettre du Président de la République aux Outre-mer », citée par Les Nouvelles Calédoniennes, 31 mars 2022.

[3] Discours d’Emmanuel Macron au théâtre de Nouville, 5 mai 2018. Disponible en ligne.

[4] « Malgré les demandes des partis indépendantistes de reporter la date du scrutin pour des motifs tirés du contexte sanitaire et du deuil coutumier kanak alors proclamé, le scrutin a été maintenu et a vu le « non » l’emporter avec 96,5 % des suffrages exprimés. Toutefois, cette victoire du « non » s’est accompagnée d’un effondrement de la participation […]. » Citation extraite de : « Les outre-mer aux avant-postes 2022 », journée d’étude organisée par le journal Le Point, 25 janvier 2022.

[5] Sénat, session extraordinaire de 2021-2022, n° 831, Rapport d’information fait au nom de la Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, 27 juillet 2022.

[6] Ibid., p. 20.

[7] France info, 16 juillet 2022.

[8] Article 32 de la « Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones » du 13 septembre 2007.

[9] Ce comité spécial communément appelé « Comité de la décolonisation » ou « Comité spécial des 24 » est un organe subsidiaire de l’Assemblée générale de l’ONU, créé en 1961, sur le fondement de la résolution 1654 (XVI) en date du 27 novembre 1961.

[10] Nic Maclellan in Islands Business, 11 juillet 2022. Extrait du rapport remis aux membres du Forum : « The result of the referendum is an inaccurate representation of the will of registered voters and instead can be interpreted as a representation of a deep-seated ethnic division in New Caledonia, which the Committee fears has been exacerbated by the State’s refusal to postpone the referendum. »

[11] Ce « groupe de contact » dont on note le caractère informel, est présidé par Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemb