Répondre en juriste aux mouvements anti-IVG
L’arrêt Dobbs v. Jackson rendu par la Cour suprême des États-Unis en juin 2022 a provoqué une déflagration médiatique et politique de portée mondiale. Rares ont été les décisions juridictionnelles qui, ces dernières années, ont autant fait parler d’elles.

Si les effets de cette décision sont terribles en ce qui concerne l’accès à l’avortement des femmes états-uniennes, l’arrêt Dobbs aura eu au moins pour mérite de rappeler la centralité du droit dans l’accès des femmes à l’avortement et, dans une certaine mesure, la fragilité (ou la précarité) de cette liberté : ce que le droit permet aujourd’hui, il peut demain l’interdire.
C’est précisément cette crainte qui a suscité, en France, de vifs débats sur la nécessité de constitutionnaliser l’accès à l’avortement : afin que, précisément, les permissions aujourd’hui accordées par la loi en matière d’interruption volontaire de grossesse (IVG), ne puissent pas être aisément anéanties à l’avenir.
La question de l’accès à l’avortement était alors remise sur le devant de la scène politique alors même qu’un certain statu quo (plutôt libéral) existait en la matière en France : depuis les intenses débats relatifs à la loi de 2001 (assouplissant le régime juridique de l’IVG mis en place en 1975), les discussions entourant les évolutions législatives dans ce domaine étaient relativement apaisées. Certes, en 2014, au moment de la suppression de la condition de « détresse » présente dans les textes depuis 1975[1], ou en 2022, au moment de l’allongement du délai d’IVG de douze à quatorze semaines de grossesse, il y a pu, bien sûr, y avoir des oppositions et quelques controverses dans l’arène parlementaire. Mais ces modifications n’ont suscité aucun tollé généralisé ni aucun intérêt médiatique particulier.
C’est que, contrairement aux États-Unis, en France, l’IVG occupe une place spécifique dans le débat juridique français : à l’exception (notable) des récentes modifications relatives à la réduction embryonnaire[2], l’interve