Petites punitions, grandes préoccupations
«Tu casses, tu répares. Tu salis, tu nettoies. Tu défies l’autorité, tu apprends à la respecter » : c’est par ces mots que le Premier ministre, Gabriel Attal, justifiait dans son discours de politique générale, le 30 janvier dernier, la création d’une nouvelle « sanction éducative » (le « travail d’intérêt éducatif ») à destination des jeunes « émeutiers » de juin 2023. La mesure de nature infrapénale, calquée sur les travaux d’intérêt général prononcés par la justice, devrait intégrer l’échelle des sanctions scolaires pour des jeunes de moins de 16 ans.

Punir : qui ? comment ? à quoi bon ? Les discours appelant à plus de sanctions et les polémiques sur celles qui font scandale rythment l’actualité récente. « Passion contemporaine » selon l’expression de Didier Fassin[1], la punition caractériserait nos sociétés depuis les années 1970, notamment à cause d’un recours toujours plus systématique à la justice et à la prison dans le traitement des problèmes sociaux. Analyser cette passion ne peut cependant pas faire l’économie de l’infrajudiciaire, ce que Michel Foucault nommait les « micropénalités ». Il n’y a qu’à songer à la récente polémique qui s’est invitée dans les pages des plus grands quotidiens nationaux sur le time out appliqué aux très jeunes enfants, pour constater que les sanctions du quotidien ne cessent de nourrir les débats sur la légitimité, les modalités et le sens même de l’acte punitif.
Dans cette actualité punitive dense, les institutions qui, tout au long de la vie, accueillent, soignent, éduquent, enferment, constituent des espaces particuliers par le nombre et l’ampleur des scandales. On pourrait aisément multiplier les exemples : entre la polémique sur une punition collective administrée à des jeunes du Service National Universel à l’été 2023 dans la cour d’un lycée strasbourgeois à la tombée de la nuit ; la publication fracassante de l’enquête de Victor Castanet sur les conditions de vie dans les EHPAD du groupe Orpea[2]; les dénoncia