Santé

« Traité pandémie » : la sidération puis l’oubli ?

Politiste

Apprendre des erreurs du Covid et se prémunir collectivement de désastres sanitaires communs. Telle était l’ambition du « Traité Pandémie » discuté depuis deux ans et dont le neuvième cycle de négociations, qui devait être le dernier, vient de se terminer à Genève. Sans déboucher pour l’instant sur une gouvernance mondiale de la santé équitable et transparente.

La pandémie a été un choc planétaire, une sidération. Pendant un temps, nos vies ont été suspendues. Le « plus jamais ça ! » s’imposait unanimement. Marqués par la tragédie d’innombrables morts et par les injustices, l’iniquité et le manque de solidarité internationale, de nombreux États ont appelé de leurs vœux l’élaboration d’un accord international destiné à ne pas reproduire les mêmes erreurs lorsqu’une nouvelle pandémie frappera.

publicité

L’espoir d’un progrès était alors tangible. Alors que l’on arrive au terme de deux années de négociation sur un « traité pandémique » à Genève, dans le cadre de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’espoir a été remplacé par la froideur du réalisme politique, les ambitions de progrès par le cynisme du chacun pour soi, et l’effet vertueux de l’apprentissage par le pragmatisme.

L’oubli va-t-il supplanter la sidération que nous avons tous vécue ? Cette négociation nous rappelle qu’en dépit de l’ampleur de la tragédie, il est possible de perdre de vue le fait que la santé est un bien commun. Alors que les négociations se sont terminées le 28 mars et qu’une session complémentaire se tiendra en avril, il reste à voir si nous parviendrons à tirer les leçons des erreurs passées et à mettre sur pied une gouvernance mondiale de santé plus efficace, inclusive, solidaire et, surtout, équitable.

Les constats tragiques de la pandémie

Au-delà du nombre vertigineux de décès liés au virus du Covid-19 (estimé à 6,8 millions), la pandémie a nourri d’autres constats problématiques concernant le fonctionnement du système international de santé et de la coopération internationale dans son ensemble. Cette pandémie a constitué un puissant révélateur de l’ampleur des inégalités à l’échelle mondiale. Alors qu’en décembre 2023, l’Union européenne détruisait pour 4 milliards d’euros de vaccins périmés – soit environ 215 millions de doses – de nombreux pays n’avaient pas eu accès à ces vaccins pendant la crise.

Le nombre de morts a été extrêmement


[1] Conférence donnée à Sciences Po Paris, le 31 mars 2022.

[2] Katrina Perehudoff, Ellen ‘t Hoen, Kaitlin Mara, et al, « A pandemic treaty for equitable global access to medical countermeasures : seven recommendations for sharing intellectual property, know-how and technology », BMJ Global Health, 2022.

[3] Clare Wenham et al, « The futility of a Pandemic Treaty », International affairs, 2022.

[4] Clare Wenham et al, ibid, p. 838.

[5] Kevin Parthenay, « La diplomatie des vaccins anti-Covid en Amérique latine et Caraïbe : repenser la dichotomie dépendance versus autonomie », Annuaire français des relations internationales, vol. 23, 2022, p.343-362.

[6] Katrina Perehudoff, Ellen ‘t Hoen, Kaitlin Mara, et al, ibid.

[7] Rapport du directeur général : « Renforcer l’architecture mondiale de préparation, de réponse et de résilience aux urgences sanitaires. Dix propositions pour construire ensemble un monde plus sûr », 5 janvier 2023.

[8] Les États représentés dans ce Bureau sont : le Japon, le Brésil, la Thaïlande, les Pays-Bas, l’Afrique du Sud et l’Égypte.

[9] Afrique du Sud, Argentine, Bangladesh, Botswana, Brésil, Chine, Colombie, Égypte, El Salvador, Eswatini, Éthiopie, Fidji, Guatemala, Inde, Indonésie, Iran, Kenya, Malaisie, Mexique, Namibie, Pakistan, Palestine, Paraguay, Pérou, Philippines, République dominicaine, Tanzanie, Thaïlande, Tchad, République centrafricaine, Palestine, Uruguay.

[10] Dans les pratiques de négociation multilatérales, ces crochets renvoient à des propositions de modification formulées par un État en attente de validation ou en discussion. Cette information est communiquée par James Love, directeur de Knowledge Ecology International (KEI) et observateur de cette négociation à Genève, sur son compte X (@jamie_love).

[11] Sur ce point, une incertitude demeure encore sur la nature juridique de l’accord. Si l’accord est signé sous l’article 19 (convention) de la Constitution de l’OMS, il devra faire l’objet d’une ratification par un nombre mini

Kevin Parthenay

Politiste, Professeur agrégé de science politique à l’Université de Tours

Rayonnages

InternationalSanté

Mots-clés

Vaccins

Notes

[1] Conférence donnée à Sciences Po Paris, le 31 mars 2022.

[2] Katrina Perehudoff, Ellen ‘t Hoen, Kaitlin Mara, et al, « A pandemic treaty for equitable global access to medical countermeasures : seven recommendations for sharing intellectual property, know-how and technology », BMJ Global Health, 2022.

[3] Clare Wenham et al, « The futility of a Pandemic Treaty », International affairs, 2022.

[4] Clare Wenham et al, ibid, p. 838.

[5] Kevin Parthenay, « La diplomatie des vaccins anti-Covid en Amérique latine et Caraïbe : repenser la dichotomie dépendance versus autonomie », Annuaire français des relations internationales, vol. 23, 2022, p.343-362.

[6] Katrina Perehudoff, Ellen ‘t Hoen, Kaitlin Mara, et al, ibid.

[7] Rapport du directeur général : « Renforcer l’architecture mondiale de préparation, de réponse et de résilience aux urgences sanitaires. Dix propositions pour construire ensemble un monde plus sûr », 5 janvier 2023.

[8] Les États représentés dans ce Bureau sont : le Japon, le Brésil, la Thaïlande, les Pays-Bas, l’Afrique du Sud et l’Égypte.

[9] Afrique du Sud, Argentine, Bangladesh, Botswana, Brésil, Chine, Colombie, Égypte, El Salvador, Eswatini, Éthiopie, Fidji, Guatemala, Inde, Indonésie, Iran, Kenya, Malaisie, Mexique, Namibie, Pakistan, Palestine, Paraguay, Pérou, Philippines, République dominicaine, Tanzanie, Thaïlande, Tchad, République centrafricaine, Palestine, Uruguay.

[10] Dans les pratiques de négociation multilatérales, ces crochets renvoient à des propositions de modification formulées par un État en attente de validation ou en discussion. Cette information est communiquée par James Love, directeur de Knowledge Ecology International (KEI) et observateur de cette négociation à Genève, sur son compte X (@jamie_love).

[11] Sur ce point, une incertitude demeure encore sur la nature juridique de l’accord. Si l’accord est signé sous l’article 19 (convention) de la Constitution de l’OMS, il devra faire l’objet d’une ratification par un nombre mini