International

Taiwan : mauvaises surprises post-électorales

Politiste, étudiant

Dans la soirée de mardi et en troisième lecture, le Parlement taïwanais a voté plusieurs lois qui accentuent son contrôle sur l’exécutif élu en janvier. Disposant d’une courte majorité, les partis d’opposition ont fait accélérer les procédures parlementaires, provoquant des séances d’émeutes dans l’Hémicycle et de grandes manifestations dans les rues de Taipei.

On aurait pu s’attendre à ce que le mandat de Lai Ching-te (William Lai), le président taïwanais élu le 13 janvier 2024 et entré en fonction le 20 mai dernier, s’inscrivît dans la continuité de ceux de Mme Tsai Ing-wen (2016-2024). Il semblait probable que le nouveau gouvernement, issu du même parti que celui de Madame Tsai dont Lai était le vice-Président, poursuivrait les réformes que la présidente Tsai n’avait pas eu le temps de faire.

Mais les résultats aux législatives du même jour ont tout de suite modifié la perspective. Le Parti démocrate progressiste (PDP), reconduit à la tête de l’exécutif, a aussitôt perdu au « Yuan législatif », le Parlement de Taïwan, la majorité absolue – acquise sous la présidence de Mme Tsai pour la première fois depuis les débuts de la démocratisation de Taiwan dans les années 90. Les deux partis d’opposition, le Kuomintang (KMT, favorable à un rapprochement avec Pékin) et le PPT (Parti du peuple taïwanais) ont quant à eux gagné quelques sièges supplémentaires, sans avoir non plus de quoi obtenir une majorité absolue.

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Cette représentation quasi-égale des deux principaux partis de Taïwan (51 sièges pour le parti au pouvoir, le PDP, et 52 pour le KMT) avec, entre eux, un arbitre (le Parti du peuple taïwanais, PPT, 8 sièges), a ouvert une configuration certes inédite, mais qui rappelle instantanément celle qu’endura le premier président issu des rangs de l’opposition, Chen Shui-bian (2000-2008). Durant ses dix années au pouvoir, son parti, le Parti démocrate progressiste (PDP), n’a pas pu disposer d’une majorité parlementaire absolue. La majorité était alors encore entre les mains du Kuomintang, l’ancien parti venu de Chine avec Chiang Kai-shek et qui avait instauré en 1948 la dictature à Taïwan. Mauvais perdant, ce dernier avait durant toute la présidence de Chen Shui-bian fait usage de sa majorité pour bloquer tant les réformes inspirées par le parti taïwanais, que les achats d’armes aux États-Unis, pourtant nécessaires à l


[1] Interview avec une volontaire anonyme, 28 mai, librairie TouatBooks (左轉有書).

Stéphane Corcuff

Politiste, Maître de conférence en politique du monde chinois contemporain à l’institut d’études politique de Lyon

Tai-Jan Chiu

étudiant, Licencié en études régionales asiatiques et africaines

Notes

[1] Interview avec une volontaire anonyme, 28 mai, librairie TouatBooks (左轉有書).