D’un Front populaire à l’autre : le rôle de la Ligue des Droits de l’Homme
Le 9 juin, au soir d’élections européennes marquées par une forte progression de l’extrême droite en France et par la décision inattendue du président de la République de dissoudre l’Assemblée nationale, le député la France insoumise François Ruffin lance un appel solennel à la reconstitution d’un Front populaire.
Les acteurs et observateurs évoquent rapidement un « Nouveau Front populaire ». Simple rejeu symbolique mémoriel, en l’occurrence conjoncturel, ou réanimation voire ressourcement en profondeur d’un schéma révérenciel populaire, celui de gauches (de nouveau) (ré)unies pour « faire barrage au fascisme », comme en 1936 ? S’agit-il du simple culte d’un momentum voire d’une mythologisation d’un temps de l’histoire dont les échos se font encore entendre, un temps marqué par des convergences, en particulier partidaires, aboutissant toutefois à un gouvernement éphémère et au bilan mitigé, pour de multiples raisons ? Assiste-t-on plutôt à l’instrumentalisation par des forces politiques à la fois d’une expérience réifiée et même glorifiée – et dans quelle mesure ? –, et de l’homme qui en a été l’incarnation, Léon Blum[1] ?

D’un côté, dans un confusionnisme assumé, le président de la République Emmanuel Macron affirme en effet que, « s’il y en a un qui doit se retourner dans sa tombe, c’est Léon Blum, en pensant qu’on a appelé Front populaire une alliance électorale qui permettra de donner 300 circonscriptions à LFI, donc à des gens qui ont assumé très clairement de ne pas condamner l’antisémitisme. C’est pas [sic] ça le Front populaire, ça a un sens dans notre histoire, ça a un rôle, ça a une dignité. C’est pas ça [sic] » ; de l’autre, Jean-Luc Mélenchon déclare que « quand Léon Blum devient chef du gouvernement, il n’est pas au niveau de Manuel Bompard ni de Mathilde Panot ou de Clémence Guetté, il était critique d’art et militant marxiste du Parti socialiste » …
Loin de minimiser l’héritage du gouvernement du Front populaire, au contraire, il nous appara